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Coups de cœur
Une Femme est l'amour
Une femme est l'amour, la gloire et l'espérance ;
Aux enfants qu'elle guide, à l'homme consolé,
Elle élève le cœur et calme la souffrance,
Comme un esprit des cieux sur la terre exilé.
Courbé par le travail ou par la destinée,
L'homme à sa voix s'élève et son front s'éclaircit ;
Toujours impatient dans sa course bornée,
Un sourire le dompte et son cœur s'adoucit.
Dans ce siècle de fer la gloire est incertaine :
Bien longtemps à l'attendre il faut se résigner.
Mais qui n'aimerait pas, dans sa grâce sereine,
La beauté qui la donne ou qui la fait gagner ?
Gérard de Nerval
La poésie, c'est le temps
La poésie, c'est le temps durant lequel un homme oublie qu'il va mourir.
Georges Perros,
Ithaque
Quand tu prendras le chemin d’Ithaque,
souhaite que la route soit longue,
pleine d’aventures, pleine d’enseignements.
Les Lestrygons et les Cyclopes,
ne les crains pas, ni la colère de Poséidon,
jamais tu ne trouveras rien de tel sur ton chemin,
si ta pensée reste élevée, si une émotion rare
étreint ton esprit et ton corps.
Les Lestrygons et les Cyclopes,
tu ne les rencontreras pas, ni l’irascible Poséidon,
si tu ne les transportes pas dans ton âme,
si ton âme ne les fait surgir devant toi.
Souhaite que la route soit longue.
Que nombreux soient les matins d’été
où – avec quel plaisir et quelle joie ! –
tu découvriras des ports que tu n’as jamais vus ;
arrête-toi dans les comptoirs phéniciens
pour te procurer de précieuses marchandises,
ambre, corail, ébène, nacre,
et capiteux parfums de toutes sortes,
le plus que tu pourras de capiteux parfums ;
visite aussi beaucoup de villes égyptiennes,
et n’aie de cesse de t’instruire auprès de ceux qui savent.
Garde toujours Ithaque présente à ton esprit.
Y parvenir est ta destination finale.
Mais ne te hâte surtout pas dans ton voyage.
Mieux vaut le prolonger pendant des années ;
et n’aborder dans l’île que dans ta vieillesse,
riche de ce que tu auras gagné en chemin,
sans attendre d’Ithaque aucun autre bienfait.
Ithaque t’a offert ce beau voyage.
Sans elle, tu n’aurais pas pris la route.
Elle n’a rien de plus à t’apporter.
Et même si elle est pauvre, Ithaque ne t’a pas trompé.
Sage comme tu l’es, avec une expérience pareille,
Tu as sûrement déjà compris ce que les Ithaques signifient.
Constantin Cavafis
Le Pont des Arts dans le brouillard
Toi et moi
Que tu es belle, mon amie, que tu es belle !
Que tu es belle, mon amie, que tu es belle ! Tes yeux sont des colombes, Derrière ton voile. Tes cheveux sont comme un troupeau de chèvres, Suspendues aux flancs de la montagne de Galaad. Tes dents sont comme un troupeau de brebis tondues, Qui remontent de l'abreuvoir; Toutes portent des jumeaux, Aucune d'elles n'est stérile. Tes lèvres sont comme un fil cramoisi, Et ta bouche est charmante ; Ta joue est comme une moitié de grenade, Derrière ton voile. Ton cou est comme la tour de David, Bâtie pour être un arsenal ; Mille boucliers y sont suspendus, Tous les boucliers des héros. Tes deux seins sont comme deux faons, Comme les jumeaux d'une gazelle, Qui paissent au milieu des lis. Avant que le jour se rafraîchisse, Et que les ombres fuient, J'irai à la montagne de la myrrhe Et à la colline de l'encens. Tu es toute belle, mon amie, Et il n'y a point en toi de défaut. [...] Tu me ravis le cœur, ma sœur, ma fiancée, Tu me ravis le cœur par l'un de tes regards, Par l'un des colliers de ton cou. Que de charmes dans ton amour, ma sœur, ma fiancée ! Comme ton amour vaut mieux que le vin, Et combien tes parfums sont plus suaves que tous les aromates! Tes lèvres distillent le miel, ma fiancée ; Il y a sous ta langue du miel et du lait, Et l'odeur de tes vêtements est comme l'odeur du Liban. Tu es un jardin fermé, ma sœur, ma fiancée, Une source fermée, une fontaine scellée. [...] Lève-toi, aquilon ! viens, autan ! Soufflez sur mon jardin, et que les parfums s'en exhalent !
Cantique de Salomon, appelé aussi Cantique des cantiques
L'amour de lui
L'amour de lui m'a ressaisie dans son étreinte,
mon grand effort est resté sans profit.
L'amour est une mer, la côte hors de vue :
sages,vous le savez, à quoi bon tenter de nager ?
L'amour lorsque tu veux le mener à son terme,
te fait accepter bien des déplaisirs,
Faire bonne figure à plus d'un méchant coup
et déguster comme nectar plus d'un breuvage empoisonné.
Je me suis débattue comme un poulain sauvage
qui ne sais pas que plus il tire et plus il serre ses entraves.
Malédiction
Ah! puisse Dieu te rendre amoureux à ton tour
d'une cruelle au coeur de pierre comme toi-même!
Puisses-tu goûter de l'amour et la brûlure et le souci ;
te tordre dans la solitude, et savoir ce que je valais !
Râbe'è
Gambia
Sonnet LXXXVII
Si ce n’est pas l’amour, qu’est-ce donc que je sens ? Mais si c’est l’amour, pour Dieu, quelle chose est-ce ? Si elle est bonne, pourquoi produit-elle un effet cruellement mortel ? Si elle est mauvaise, pourquoi tous les tourments qu’elle occasionne sont-ils si doux ?
Si c’est volontairement que je brûle, pourquoi est-ce que je pleure et que je me lamente ? Si c’est malgré moi, à quoi sert de me lamenter ? Ô mort aiguë, ô délicieux mal, comment avez-vous tant de pouvoir sur moi si je n’y consens point ?
Et si j’y consens, c’est à grand tort que je me plains. Au milieu de vents si contraires, je me trouve en pleine mer sur une frêle barque et sans gouvernail,
Si léger de savoir, si chargé d’erreur, que je ne sais pas moi-même ce que je me veux, et que je tremble en plein été, et brûle en plein hiver.
François Pétrarque