Coups de cœur
Il nous faut croiser
Qui pourrait décrire le désir
Qui pourrait décrire le désir quand il est aussi torride, chargé de succulences, impérieux ? Il échappe aux mots. Seule, peut-être, la musique peut rendre la puissance de la houle qui le porte, le souffle brûlant et les vibrations qu’il dégage. Il m’a, naguère, inspiré un tableau (allons, tant pis, fini le secret ! On sait maintenant ce que je fais). La toile était ronde, et j’avais peint une incandescence orange au centre, vers laquelle vibrait un déferlement d’ondes rouges et lavande. (J’en étais alors à ma période dite abstraite, qui suivit ma période dite figurative, laquelle précéda ma période dite postmoderniste, celle des photogrammes.) Ces ondes de rouges et de lavande, semblables aux orbes futuristes d’une meurtrissure, j’en ressens physiquement le choc à présent : elles me pénètrent, m’envahissent avec les caresses de mon amant qui parcourent mon corps, glissent jusqu’à mes fesses, se coulent entre mes cuisses où ses doigts écartent la fente de la culotte rouge, trouvent l’orée satinée. Et je me liquéfie…
La suite, qui ne la connaît d’avance, moi la première ? – à ceci près que je suis affolée de désir.
Erica Jong, Nana blues
Tu m’as tout pris
Tu m’as tout pris…
Tu m’as pris jusqu’à la seconde d’oubli …
Je m’échappe à moi-même
Je me coule entre les doigts
Et je ruisselle sur ma vie
Comme sur une plaine morte
Je pense à vous
Les mots sont neufs
Fondants comme une rose de Noël
Dans l’arbre
Avec ses surprises, ses flammes, sa légende
Marcher avec toi
Me mettre du rouge avec toi
Du rouge aux lèvres
Du rouge aux ongles
Du rouge au cœur
Retrouver le monde avec toi
Dans mes deux mains
Parce que tu m’auras conté
Une pluie au printemps
Ou un cuivre qui fait l’amour
Avec le soleil
Mourir de ta chair en moi
M’endormir et rêver que je rêve de toi
Quand je reste seule
Je tends mes doigts vers ta réalité
Qui est la mienne
T’avoir pour maître
Oh ! Cette chance, ce miracle
Ce don de toi à mes côtés
Attendre
Pour te réinventer
La venue inouïe de ton visage
Connaître ton visage
Connaître ton baiser
Connaître ton amour
En mourir, en mourir.
Claude de Burine
Young girl
Poèmes divers, II
Il aimait à la voir, avec ses jupes blanches,
Courir tout au travers du feuillage et des branches,
Gauche et pleine de grâce, alors qu'elle cachait
Sa jambe, si la robe aux buissons s'accrochait.
Charles Baudelaire
Je conçois mal la poésie
Je conçois mal la poésie si elle n'est pas la manifestation
de la révolte essentielle d'un être contre les lois absurdes
de l'univers dans lequel il se trouve, bien malgré lui, jeté
-- Michel Leiris
Des sommets des montagnes
Des sommets des montagnes
Des villages
Des villes
Des bosquets
Des forêts
Des jardins
Des lits
Provient le bois des cercueils.
Hala Mohammad
Wonderful Life
Ces longues nuits d'hiver
Ces longues nuits d'hiver, où la Lune ocieuse
Tourne si lentement son char tout à l'entour,
Où le Coq si tardif nous annonce le jour,
Où la nuit semble un an à l'âme soucieuse :
Je fusse mort d'ennui sans ta forme douteuse,
Qui vient par une feinte alléger mon amour,
Et faisant, toute nue, entre mes bras séjour,
Me pipe doucement d'une joye menteuse.
Vraie tu es farouche, et fière en cruauté :
De toi fausse on jouit en toute privauté.
Pres ton mort je m'endors, près de lui je repose :
Rien ne m'est refusé. Le bon sommeil ainsi
Abuse par le faux mon amoureux souci.
S'abuser en amour n'est pas mauvaise chose
Pierre de Ronsard