Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Vertuchou.over-blog.com

poetes d'aujourd'hui

Ce matin

19 Juin 2025, 00:57am

Publié par vertuchou

Ce matin je suis sorti bien tôt,
Pour m'être réveillé encore plus tôt
Sans avoir le moindre envie de faire quoi que ce soit...

Je ne savais quel chemin prendre
Mais le vent soufflait fort, il balayait dans un seul sens,
Et j'ai suivi le chemin vers où le vent me soufflait dans le dos.

Telle a toujours été ma vie, et
Telle je désire qu'elle soit toujours -
Je vais où le vent m'emporte et je ne me
Sens pas penser. 

Fernando Pessoa

Voir les commentaires

Allons en ville tous les deux

13 Juin 2025, 00:56am

Publié par vertuchou

Allons en ville tous les deux 

Je prendrai ta main,
                      qui me rappelle
                      un chat que j'ai bien connu,
                      et nous irons marcher.
 
                      Je te parlerai de choses et d'autres,
                      et je te ferai sourire
                      et pouffer et rire
                      comme un petit enfant.
 
                      Je te montrerai des choses
                      à regarder.
 
                      Peut-être que je m'arrêterai pour t'embrasser
                      devant tout le monde.
 
                      Je m'en fous d'ailleurs
                      parce que je t'aime
                      plus qu'une montagne
                      que j'ai bien connue.

Richard Brautigan

Voir les commentaires

Poèmes pour la paix

9 Juin 2025, 01:19am

Publié par vertuchou

I

Toutes les femmes heureuses ont
Retrouvé leur mari - il revient du soleil
Tant il apporte de chaleur.
Il rit et dit bonjour tout doucement
Avant d'embrasser sa merveille.

II

Splendide, la poitrine cambrée légèrement,
Sainte ma femme, tu es à moi bien mieux qu'au temps
Où avec lui, et lui, et lui, et lui, et lui,
Je tenais un fusil, un bidon - notre vie !

III

Tous les camarades du monde,
O ! mes amis !
Ne valent pas à ma table ronde
Ma femme et mes enfants assis,
O ! mes amis !

IV

Après le combat dans la foule,
Tu t'endormais dans la foule.
Maintenant, tu n'auras qu'un souffle près de toi,
Et ta femme partageant ta couche
T'inquiètera bien plus que les mille autres bouches.

V

Mon enfant est capricieux -
Tous ses caprices sont faits
J'ai un bel enfant coquet
Qui me fait rire et rire.

Paul Eluard

Voir les commentaires

On finit

5 Juin 2025, 00:17am

Publié par vertuchou

On finit par répondre
qu’on est là, faire signe
parmi nos absences
ne plus fuir la mémoire
de certaines failles qui blessent
plus que d’autres

On finit par s’ouvrir
au silence qui revient
et ne plus répondre
au bruit des pas, ne plus croire
qu’on a aimé, soutenu un instant
la beauté de notre vie

On finit par sentir le temps
qui replie nos regards
lentement les referme, comme une blessure
dont on ne sait plus parler

Hélène Dorion

Voir les commentaires

Sur le fil

1 Juin 2025, 00:56am

Publié par vertuchou

les plus beaux cheveux
que j’ai  jamais vus
n’avaient même pas
de visage

mais moi non plus
je n’avais pas de mains
pour pouvoir
 les caresser

Paul Vinicius
 

Voir les commentaires

Toucher la Lumière

26 Mai 2025, 00:53am

Publié par vertuchou

Par une nuit de pleine lune
essaye de fixer la galaxie
Tu verras qu’elle est cours d’eau
avec tes bras pour affluents
ta poitrine pour estuaire

Aujourd’hui le ciel a écrit son poème
à l’encre blanche
Il l’a appelé neige

Ton rêve rajeunit tandis que tu vieillis
Le rêve grandit en marchant
vers l’enfance

Le rêve est une jument
qui au loin nous emporte
sans jamais se déplacer

Le nuage est las de voyager
Il descend à la plus proche rivière
pour laver sa chemise
A peine a-t-il mis les pieds dans l’eau
que la chemise se dissout
et disparaît

Une rose sort de son lit
prend les mains du matin
pour se frotter les yeux

Le palmier parle avec son tronc
la rose avec son odeur

Le vent et l’espace vagabondent
main dans la main

Arc-en-ciel ?
Unité du ciel et de la terre
tressés en une seule corde

Il marche sur les versants de l’automne
appuyé au bras du printemps

Le ciel pleure lui aussi
mais il essuie ses larmes
avec le foulard de l’horizon

Quand vient la fatigue
le vent déroule le tapis de l’espace
afin de s’y allonger

Dans la forêt de mes jours
aucune place
sauf pour le vent

Pour toucher la lumière
tu dois t’appuyer sur ton ombre

Je sens parfois que le vent
est un enfant qui crie
porté sur mes épaules

Comment décrire à l’arbre
le goût de son fruit ?
A l’arc
le travail de la corde ?

Telle une main
la lumière se déplace
sur le corps des ténèbres

C’est l’épaule de l’espace
qui s’effondre là-bas
sous les nuages noirs

L’espace dans l’œil de la guillotine
est lui aussi tête à couper

Tu ne peux être lanterne
si tu ne portes la nuit
sur tes épaules

Je conclurai un pacte avec les nuages
pour libérer la pluie
Un autre avec le vent
pour qu’il nous libère
les nuages et moi

La parole est demeure dans l’exil
chemin dans la patrie

Qu’il est étrange ce pacte
entre les vagues et le rivage –
le rivage écrit le sable
les vagues effacent l’écriture

Mémoire – ton autre demeure
où tu ne peux pénétrer
qu’avec un corps devenu
souvenir.    

Adonis
 

Voir les commentaires

Faire

18 Mai 2025, 00:33am

Publié par vertuchou

Faire de l'interruption, un nouveau chemin,                                                            
faire de la chute, un pas de danse,                                                                                                 
faire de la peur, un escalier,                                                                                                          
du rêve, un pont,                                                                                                 
 de la recherche…                                                                                                                                
une rencontre.              

Fernando Sabino

Voir les commentaires

Je me défais de la douleur

14 Mai 2025, 00:40am

Publié par vertuchou

Que suis-je prêt à sacrifier ?
Irai-je aux abattoirs pour boire du sang de brebis,
Me ferai-je oiseau noir sur la cime du dernier arbre ?
Vendrai-je l'ombre du fou sans lui en demander la
permission ?
Quand on criera mon nom bougerai-je les oreilles comme
un chien ?
Domine non sum dignus ut intres sub tactum meum
Je laisse ma maison brûler pour la transformer en navire
J'accepte dans mon sépulcre la gloire de l'autre
Je marche sur le même point jusqu'à le convertir en puits
Je me défais de la douleur comme d'un vieux manteau

Alejandro Jodorowsky

Voir les commentaires

Un ami dort

10 Mai 2025, 00:01am

Publié par vertuchou

   

Tes mains jonchant les draps étaient mes feuilles mortes.
            Mon automne aimait ton été.
Le vent du souvenir faisait claquer les portes
            Des lieux où nous avons été.
 
Je te laissais mentir ton sommeil égoïste
            Où le rêve efface tes pas.
Tu crois être où tu es. Il est tellement triste
            D’être toujours où l’on n’est pas.
 
Tu vivais enfoncé dans un autre toi-même
            Et de ton corps si bien abstrait,
Que tu semblais de pierre. Il est dur, quand on aime,
            De ne posséder qu’un portrait.
 
Immobile, éveillé, je visitais les chambres
            Où nous ne retournerons point.
Ma course folle était sans remuer les membres,
            Le menton posé sur mon poing.
 
Lorsque je revenais de cette course inerte,
            Je retrouvais avec ennui,
Tes yeux fermés, ton souffle et ta main grande ouverte,
            Et ta bouche pleine de nuit.
 
Que ne ressemblons-nous à cet aigle à deux têtes,
            À Janus au double profil,
Aux frères Siamois qu’on montre dans les fêtes,
            Aux livres cousus par un fil ?
 
L’amour fait des amants un seul monstre de joie,
            Hérissé de cris et de crins,
Et ce monstre, enivré d’être sa propre proie,
            Se dévore avec quatre mains.
 
Quelle est de l’amitié la longue solitude ?
            Où se dirigent les amis ?
Quel est ce labyrinthe où notre morne étude
            Est de nous rejoindre endormis ?
 
Mais qu’est-ce que j’ai donc ? Mais qu’est-ce qui m’arrive ?
            Je dors. Ne pas dormir m’est dû.
À moins que, si je dors, je n’aille à la dérive
            Dans le rêve où je t’ai perdu.
 
Dieu qu’un visage est beau lorsque rien ne l’insulte.
            Le sommeil, copiant la mort,
L’embaume, le polit, le repeint, le resculpte,
            Comme Égypte ses dormeurs d’or.
 
Or je te contemplais, masqué par ton visage,
            Insensible à notre douleur.
Ta vague se mourait au bord de mon rivage
            Et se retirait de mon cœur.
 
La divine amitié n’est pas le fait d’un monde
            Qui s’en étonnera toujours.
Et toujours il faudra que ce monde confonde
            Nos amitiés et nos amours.
 
Le temps ne compte plus en notre monastère.
            Quelle heure est-il ? Quel jour est-on ?
Lorsque l’amour nous vient, au lieu de nous le taire,
            Vite, nous nous le racontons.
 
Je cours. Tu cours aussi, mais à contre machine.
            Où t’en vas-tu ? Je reviens d’où ?
Hélas, nous n’avons rien d’un monstre de la Chine,
            D’un flûtiste du ciel hindou.
 
Enchevêtrés en un au sommet de vos crises,
            Amants, amants, heureux amants...
Vous être l’ogre ailé, niché dans les églises,
            Autour des chapiteaux romans.
 
Nous sommes à deux bras et noués par les âmes
            (C’est à quoi s’efforcent les corps.)
Seulement notre enfer est un enfer sans flammes,
            Un vide où se cherchent les morts.
 
Accoudé près du lit je voyais sur ta tempe
            Battre la preuve de ton sang.
Ton sang est la mer rouge où s’arrête ma lampe...
            Jamais un regard n’y descend.
 
L’un de nous visitait les glaces de mémoire,
            L’autre les mélanges que font
Le soleil et la mer en remuant leurs moires
            Par des vitres, sur un plafond.
 
Voilà ce que ton œil intérieur contemple.
            Je n’avais qu’à prendre ton bras
Pour faire, en t’éveillant, s’évanouir le temple
            Qui s’échafaudait sur tes draps.
 
Je restais immobile à t’observer. Le coude
            Au genou, le menton en l’air.
Je ne pouvais t’avoir puisque rien ne me soude
            Aux mécanismes de ta chair.
 
Et je rêvais, et tu rêvais, et tout gravite.
            Le sang, les constellations.
Le temps qui point n’existe et semble aller si vite,
            Et la haine des nations.
 
Tes vêtements jetés, les plis de leur étoffe,
            Leur paquet d’ombre, leurs détails,
Ressemblaient à ces corps après la catastrophe
            Qui les change en épouvantails.
 
Loin du lit, sur le sol, une de tes chaussures
            Mourait, vivait encore un peu...
Ce désordre de toi n’était plus que blessures.
            Mais qu’est-ce qu’un dormeur y peut ?
 
Il te continuait. Il imitait tes gestes.
            On te devinait au travers.
Et ne dirait-on pas que ta manche de veste
            Vient de lâcher un revolver ?
 
Ainsi, dans la banlieue, un vol, un suicide,
            Font un tombeau d’une villa.
Sur ces deuils étendu, ton visage placide
            Était l’âme de tout cela.
 
Je reprenais la route, écœuré par le songe,
            Comme à l’époque de Plain-Chant.
Et mon âge s’écourte et le soleil allonge
            L’ombre que je fais en marchant.
 
Entre toutes cette ombre était reconnaissable.
            Voilà bien l’allure que j’ai.
Voilà bien, devant moi, sur un désert de sable,
            Mon corps par le soir allongé.
 
Cette ombre, de ma forme accuse l’infortune.
            Mon ombre peut espérer quoi ?
Sinon la fin du jour et que le clair de lune
            La renverse derrière moi.
 
C’est assez. Je reviens. Ton désordre est le même.
            Tu peux seul en changer l’aspect.
Où l’amour n’a pas peur d’éveiller ce qu’il aime,
            L’amitié veille avec respect.
 
Le ciel est traversé d’astres faux, d’automates,
            D’aigles aux visages humains.
Te réveiller, mon fils, c’est pour que tu te battes.
            Le sommeil désarme tes mains.

Jean Cocteau

Voir les commentaires

Te vêtir

6 Mai 2025, 00:35am

Publié par vertuchou

Te vêtir… Ô le paradoxe
Quand au contraire je ne veux
Pour l’amour et sa tendre boxe
Que ta parure de cheveux

C’est en vain que tu dérobes
Sous tous les plis que tu voudras
A la plus belle de tes robes
J’aime mieux le pli de tes draps.

Ôte-moi donc vite la gêne
De la souple et nerveuse gaine.

Paul Valéry

 

Voir les commentaires

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 > >>