Le silence m'a déprimé
Le silence m'a déprimé.
Ce n'était pas le silence du silence.
C'était mon propre silence.
Sylvia Plath
Coups de cœur
Le silence m'a déprimé.
Ce n'était pas le silence du silence.
C'était mon propre silence.
Sylvia Plath
Je suis la séparée, la traversante
corps illimité au prolongement des paysages
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au long des crêtes, des failles
nos brèches, des horizons
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Je n’oublie pas
tout ce noir entré dans ta bouche
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et l’orée d’une route
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elle va, rejoint
ma peau à l’étendue
Ida Jaroschek
C’est une chose étrange à la fin que le monde
Un jour je m’en irai sans en avoir tout dit
Ces moments de bonheur ces midi d’incendie
La nuit immense et noire aux déchirures blondes
Rien n’est si précieux peut-être qu’on le croit
D’autres viennent
Ils ont le cœur que j’ai moi-même
Ils savent toucher l’herbe et dire je vous aime
Et rêver dans le soir où s’éteignent des voix
D’autres qui referont comme moi le voyage
D’autres qui souriront d’un enfant rencontré
Qui se retourneront pour leur nom murmuré
D’autres qui lèveront les yeux vers les nuages
Il y aura toujours un couple frémissant
Pour qui ce matin-là sera l’aube première
Il y aura toujours l’eau le vent la lumière
Rien ne passe après tout si ce n’est le passant
C’est une chose au fond que je ne puis comprendre
Cette peur de mourir que les gens ont en eux
Comme si ce n’était pas assez merveilleux
Que le ciel un moment nous ait paru si tendre
Oui je sais cela peut sembler court un moment
Nous sommes ainsi faits que la joie et la peine
Fuient comme un vin menteur de la coupe trop pleine
Et la mer à nos soifs n’est qu’un commencement
Mais pourtant malgré tout malgré les temps farouches
Le sac lourd à l’échiné et le cœur dévasté
Cet impossible choix d’être et d’avoir été
Et la douleur qui laisse une ride à la bouche
Malgré la guerre et l’injustice et l’insomnie
Où l’on porte rongeant votre cœur ce renard
L’amertume et
Dieu sait si je l’ai pour ma part
Porté comme un enfant volé toute ma vie
Malgré la méchanceté des gens et les rires
Quand on trébuche et les monstrueuses raisons
Qu’on vous oppose pour vous faire une prison
De ce qu’on aime et de ce qu’on croit un martyre
Malgré les jours maudits qui sont des puits sans fond
Malgré ces nuits sans fin à regarder la haine
Malgré les ennemis les compagnons de chaînes
Mon Dieu mon
Dieu qui ne savent pas ce qu’ils font
Malgré l’âge et lorsque soudain le cœur vous flanche
L’entourage prêt à tout croire à donner tort
Indiffèrent à cette chose qui vous mord
Simple histoire de prendre sur vous sa revanche
La cruauté générale et les saloperies
Qu’on vous jette on ne sait trop qui faisant école
Malgré ce qu’on a pensé souffert les idées folles
Sans pouvoir soulager d’une injure ou d’un cri
Cet enfer
Malgré tout cauchemars et blessures
Les séparations les deuils les camouflets
Et tout ce qu’on voulait pourtant ce qu’on voulait
De toute sa croyance imbécile à l’azur
Malgré tout je vous dis que cette vie fut telle
Qu’à qui voudra m’entendre à qui je parle ici
N’ayant plus sur la lèvre un seul mot que merci
Je dirai malgré tout que cette vie fut belle
Louis Aragon
Il disait
nous nous offrirons
l’un à l’autre
de beaux moments
de manque.
Je serai à jamais
votre fiancé invisible.
Votre fiancé infini.
Ensemble
par-delà les lieux et les heures.
Corinne Hoex
Je veux profiter de ce moment
échevelé et en désordre,
d'odeurs et de sensations,
léger et immense.
Tout est harmonie
et le monde n'existe plus.
Juste ta peau et ton souffle
qui s'accroche à moi.
Tu es endormi et loin
sur moi comme une couverture chaude,
Tu es la seule chose que je veux vraiment.
Tiziana Miceli
Je m'allongerai sous tes paupières.
Lorsque tu les baisseras pour t'endormir,
je lancerai de l'or dans ton sommeil.
De l'or et des songes pareils à des nuages.
Christian Bobin
Ta langue, ta langue sage qui invente ma peau,
ta langue de feu qui m'enflamme,
ta langue qui crée l'instant de folie, le délire du corps,
ta langue, fouet sacré, douce braise,
ta langue de chair sans vergogne,
ta langue qui m'explore et me découvre,
ta magnifique langue qui peut aussi dire qu'elle m'aime..
D. Jaramillo Agudelo
Nuit tiède.
Les sons abstraits des voix comblaient ses oreilles.
Il pensait au port aux couleurs impressionnistes, aux hommes impassibles face aux lointains merveilleux, au ciel entre les bateaux,
comme des morceaux de monde au cœur mélancolique d'une mer
Alejandra Pizarnik
Des rayons de soleil passaient à travers la vitre.
Dans la lumière du soleil, des grains de poussière se déplaçaient en tout sens.
Je ne savais pas que c'était de la poussière.
Je pensais que c'étaient des bébés punaises.
J'ai essayé d'en attraper un.
Mais je n'ai jamais pu.
Richard Brautigan
Le temps que met l’eau à couler de ta main
Le temps que met le coq à crier le soleil
Le temps que l’araignée dévore un peu la mouche
Le temps que la rafale arrache quelques tentes
Le temps de ramener près de moi tes genoux
Le temps pour nos regards de se dire d’amour
Imaginons ce qu’on fera de tout ce temps.
Eugène Guillevic