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poetes d'hier

Tu es la goutte et l'océan

22 Février 2024, 01:07am

Publié par vertuchou

Tu es la goutte et l'océan
Mon cœur porte ta marque,
Il n'est pas ailleurs.
Sans les autres, tout va.
Sans toi, rien ne va plus.

Toi mon vin, mon ivresse,
Mon jardin, mon printemps
Mon sommeil, mon repos,
Sans toi, rien ne va plus.

Djalâl ad-Dîn Rûmî

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Paroles du solitaire

18 Février 2024, 01:06am

Publié par vertuchou

Au fil flottant d'amours fantasques et fatales
Je suis venu jusqu'au dur Vivre, inconsolé,
Par vos baisers bénits au grand néant volé,
Hasardeux rejeton de minutes brutales.

Complices, votre sang dans les veines je l'ai,
En moi vous fleurissez vieilles sèves vitales :
Mélancolique fleur aux trop rouges pétales,
Triste enfant dès la Vie à la Mort immolé.

Je ne passerai pas ma torche dans l'arène,
C'est le flambeau d'Isolde et je l'éteindrai seul ;
Nul n'outragera mon front blanc du nom d'aïeul ;

Sans m'être monnayé, pareil au fruit sans graine,
Je péris : en ce fils courbé sur tous tes pleurs,
Race, contemple-toi, comme Narcisse, et meurs.


Robert d'Humières

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Hymne à la beauté

14 Février 2024, 01:04am

Publié par vertuchou

Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,
Ô Beauté ! ton regard, infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l'on peut pour cela te comparer au vin.

Tu contiens dans ton œil le couchant et l'aurore ;
Tu répands des parfums comme un soir orageux ;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore
Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.

Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres ?
Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien ;
Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,
Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.

Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques ;
De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant,
Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,
Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.

L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,
Crépite, flambe et dit : Bénissons ce flambeau !
L'amoureux pantelant incliné sur sa belle
A l'air d'un moribond caressant son tombeau.

Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,
Ô Beauté ! monstre énorme, effrayant, ingénu !
Si ton œil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte
D'un Infini que j'aime et n'ai jamais connu ?

De Satan ou de Dieu, qu'importe ? Ange ou Sirène,
Qu'importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine ! -
L'univers moins hideux et les instants moins lourds ?


Charles Baudelaire - Les Fleurs du mal

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Poème de l'amour XXVII

10 Février 2024, 01:01am

Publié par vertuchou

Je possédais tout, mais je t’aime ;
Mon être est par moi déserté ;
Je vis distante de moi-même,
Implorant ce que j’ai été :

Songe à cette mendicité!

Est-ce ta voix ou ton silence,
Ou bien ces indulgents débats
Où, répétant ce que tu penses,
Je t’induis en tes préférences
Afin de suivre tous tes pas,
Qui me font, avec confiance,
Affirmer notre ressemblance,

O toi que je ne connais pas ?…


Anna de Noailles

 

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Parfois

6 Février 2024, 01:03am

Publié par vertuchou

Parfois les nuages
Viennent reposer les gens
D’admirer la lune

Bashô

 

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Furieusement

2 Février 2024, 01:01am

Publié par vertuchou

Je veux te prendre, toi que je tiens haletante
Contre mes seins, les yeux noirs de consentement ;
Je veux te posséder [toute] comme un amant,
Je veux te prendre jusqu’au cœur !... Je veux te prendre !...
 
Ah ! rouler ma nudité sur ta nudité,
Te fixer, te dévorer les yeux jusqu’à l’âme,
Te vouloir, te vouloir !... Et n’être qu’une femme
Sur le bord défendu de la félicité !...
 
Et m’assouvir d’une possession ingrate
Qui voudrait te combler, t’atteindre, t’éventrer,
Et qui n’est rien qu’un geste vain d’ongle fardé
Fouillant de loin ta chair profonde et délicate !.

Lucie Delarue-Mardrus

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A M. V. H.

29 Janvier 2024, 01:17am

Publié par vertuchou

Il faut, dans ce bas monde, aimer beaucoup de choses,
Pour savoir, après tout, ce qu’on aime le mieux,
Les bonbons, l’Océan, le jeu, l’azur des cieux,
Les femmes, les chevaux, les lauriers et les roses.

Il faut fouler aux pieds des fleurs à peine écloses ;
Il faut beaucoup pleurer, dire beaucoup d’adieux.
Puis le cœur s’aperçoit qu’il est devenu vieux,
Et l’effet qui s’en va nous découvre les causes.

De ces biens passagers que l’on goûte à demi,
Le meilleur qui nous reste est un ancien ami.
On se brouille, on se fuit. Qu’un hasard nous rassemble,

On s’approche, on sourit, la main touche la main,
Et nous nous souvenons que nous marchions ensemble,
Que l’âme est immortelle, et qu’hier c’est demain.

Alfred de Musset

 

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Le Soleil Levant

25 Janvier 2024, 01:14am

Publié par vertuchou

Jeune déesse au teint vermeil,
Que l’Orient révère,
Aurore, fille du Soleil,
Qui nais devant ton père,
Viens soudain me rendre le jour,
Pour voir l’objet de mon amour.

Certes, la nuit a trop duré ;
Déjà les coqs t’appellent :
Remonte sur ton char doré,
Que les Heures attellent,
Et viens montrer à tous les yeux
De quel émail tu peins les cieux.

Mouille promptement les guérets
D’une fraîche rosée,
Afin que la soif de Cérès
En puisse être apaisée,
Et fais qu’on voie en cent façons
Pendre tes perles aux buissons.

Ha ! je te vois, douce clarté,
Tu sois la bien venue :
Je te vois, céleste beauté,
Paraître sur la nue,
Et ton étoile en arrivant
Blanchit les coteaux du levant.

Le silence et le morne roi
Des visions funèbres
Prennent la fuite devant toi
Avec les ténèbres,
Et les hiboux qu’on oit gémir
S’en vont chercher place à dormir.

Mais, au contraire, les oiseaux
Qui charment les oreilles
Accordent au doux bruit des eaux
Leurs gorges non pareilles
Célébrant les divins appas
Du grand astre qui suit tes pas.

La Lune, qui le voit venir,
En est toute confuse ;
Sa lueur, prête à se ternir,
A nos yeux se refuse,
Et son visage, à cet abord,
Sent comme une espèce de mort.

Le chevreuil solitaire et doux,
Voyant sa clarté pure
Briller sur les feuilles des houx
Et dorer leur verdure,
Sans nulle crainte de veneur,
Tâche à lui faire quelque honneur

Le cygne, joyeux de revoir
Sa renaissante flamme,
De qui tout semble recevoir
Chaque jour nouvelle âme,
Voudrait, pour chanter ce plaisir,
Que la Parque le vînt saisir….

L’abeille, pour boire des pleurs,
Sort de sa ruche aimée,
Et va sucer l’âme des fleurs
Dont la plaine est semée ;
Puis de cet aliment du ciel
Elle fait la cire et le miel.

Le gentil papillon la suit
D’une aile trémoussante,
Et, voyant le soleil qui luit,
Vole de plante en plante,
Pour les avertir que le jour
En ce climat est de retour.

Là, dans nos jardins embellis
De mainte rare chose,
Il porte de la part du lys
Un baiser à la rose,
Et semble, en messager discret,
Lui dire un amoureux secret.

Au même temps, il semble à voir
Qu’en éveillant ses charmes,
Cette belle lui fait savoir,
Le teint baigné de larmes,
Quel ennui la va consumant
D’être si loin de son amant.

Marc-Antoine Girard de Saint-Amant, 1634

 

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Viens lentement

21 Janvier 2024, 01:13am

Publié par vertuchou

Viens lentement—Éden !
Des lèvres pas habituées à Toi—
Timorées—sirotent tes Jasmins
Comme l’Abeille se pâmant—
Arrivée tardivement à sa fleur,
Bourdonne autour de sa chambre—
Estime ses délices—
Pénètre—et s’abîme dans les Baumes.

Émilie Dickinson

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Allons plus vite

17 Janvier 2024, 01:00am

Publié par vertuchou


Et le soir vient et les lys meurent
Regarde ma douleur beau ciel qui me l’envoies
Une nuit de mélancolie

Enfant souris ô sœur écoute
Pauvres marchez sur la grand-route
Ô menteuse forêt qui surgis à ma voix
Les flammes qui brûlent les âmes

Sur le boulevard de Grenelle
Les ouvriers et les patrons
Arbres de mai cette dentelle
Ne fais donc pas le fanfaron
Allons plus vite nom de Dieu
Allons plus vite

Tous les poteaux télégraphiques
Viennent là-bas le long du quai
Sur son sein notre République
A mis ce bouquet de muguet
Qui poussait dru le long du quai
Allons plus vite nom de Dieu
Allons plus vite

La bouche en cœur Pauline honteuse
Les ouvriers et les patrons
Oui-dà oui-dà belle endormeuse
Ton frère
Allons plus vite nom de Dieu
Allons plus vite

Guillaume Apollinaire

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