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poetes d'hier

Les cinq doigts de la main

27 Novembre 2024, 01:51am

Publié par vertuchou

Une honnête famille où il n’y a jamais eu de banqueroute, où personne n’a jamais été pendu.
La parenté de Jean de Nivelle.


Le pouce est ce gras cabaretier flamand, d’humeur goguenarde et grivoise, qui fume sur sa porte, à l’enseigne de la double bière de mars.

L’index est sa femme, virago sèche comme une merluche, qui dès le matin soufflette sa servante dont elle est jalouse, et caresse la bouteille dont elle est amoureuse.

Le doigt du milieu est leur fils, compagnon dégrossi à la hache, qui serait soldat s’il n’était brasseur, et qui serait cheval s’il n’était homme.

Le doigt de l’anneau est leur fille, leste et agaçante Zerbine qui vend des dentelles aux dames et ne vend pas ses sourires aux cavaliers.

Et le doigt de l’oreille est le Benjamin de la famille, marmot pleureur, qui toujours se trimbala à la ceinture de sa mère comme un petit enfant pendu au croc d’une ogresse.

Les cinq doigts de la main sont la plus mirobolante giroflée à cinq feuilles qui ait jamais brodé les parterres de la noble cité de Harlem.

Aloysius Bertrand

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Le coeur pur

23 Novembre 2024, 01:43am

Publié par vertuchou

Là, sur mon front
pose ta main
comme si ta main
était ma main.

 

Comme quand on tue
veille sur moi
comme si ma vie
c’était toi.

 

Aime-moi
comme le bonheur
comme si moi
c’était ton cœur.

 

Attila József

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Ciel nocturne et chute d'étoile

19 Novembre 2024, 01:41am

Publié par vertuchou

Le ciel, grand, plein de retenue splendide,
une provision d'espace, un excès de monde.
Et nous, trop loin pour nous laisser façonner,
trop près pour nous en détourner.

Là-bas une étoile tombe ! Et notre désir à la voir,
d'un regard bouleversé, rivé à elle et pressant :
Quelles choses ont commencé et lesquelles disparu ?
Quelles choses sont coupables ? Et lesquelles pardonnées ?

Rainer Maria Rilke

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Sonnet

19 Novembre 2024, 01:40am

Publié par vertuchou

Qu'il est doux d'être au monde, et quel bien que la vie !
Tu le disais ce soir par un beau jour d'été.
Tu le disais, ami, dans un site enchanté,
Sur le plus vert coteau de ta forêt chérie.

Nos chevaux, au soleil, foulaient l'herbe fleurie :
Et moi, silencieux, courant à ton côté,
Je laissais au hasard flotter ma rêverie ;
Mais dans le fond du cœur je me suis répété :

Oui, la vie est un bien, la joie est une ivresse ;
Il est doux d'en user sans crainte et sans soucis ;
Il est doux de fêter les dieux de la jeunesse,

De couronner de fleurs son verre et sa maîtresse,
D'avoir vécu trente ans comme Dieu l'a permis,
Et, si jeunes encor, d'être de vieux amis.

Bury, le 10 août 1838.
Alfred de Musset.

 

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Les séparés

15 Novembre 2024, 01:37am

Publié par vertuchou

N'écris pas - Je suis triste, et je voudrais m'éteindre

Les beaux été sans toi, c'est la nuit sans flambeau

J'ai refermé mes bras qui ne peuvent t'atteindre,

Et frapper à mon cœur, c'est frapper au tombeau

N'écris pas !

 

N'écris pas - N'apprenons qu'à mourir à nous-mêmes

Ne demande qu'à Dieu ... qu'à toi, si je t'aimais !

Au fond de ton absence écouter que tu m'aimes,

C'est entendre le ciel sans y monter jamais

N'écris pas !

 

N'écris pas - Je te crains; j'ai peur de ma mémoire;

Elle a gardé ta voix qui m'appelle souvent

Ne montre pas l'eau vive à qui ne peut la boire

Une chère écriture est un portrait vivant

N'écris pas !

 

N'écris pas ces mots doux que je n'ose plus lire :

Il semble que ta voix les répand sur mon cœur;

Et que je les voix brûler à travers ton sourire;

Il semble qu'un baiser les empreint sur mon cœur

N'écris pas !

 

Marceline Desbordes-Valmore

 

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Au Lecteur

11 Novembre 2024, 01:36am

Publié par vertuchou

Quand je vous livre mon poème,
Mon cœur ne le reconnaît plus :
Le meilleur demeure en moi-même,
Mes vrais vers ne seront pas lus.

Comme autour des fleurs obsédées
Palpitent les papillons blancs,
Autour de mes chères idées
Se pressent de beaux vers tremblants ;

Aussitôt que ma main les touche
Je les vois fuir et voltiger,
N’y laissant que le fard léger
De leur aile frêle et farouche.

Sully Prudhomme

 

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Je regardais, au bord de la Néva,

7 Novembre 2024, 01:21am

Publié par vertuchou

Je regardais, au bord de la Néva,
Dans les vapeurs d’une brume glacée,
Resplendir la coupole dorée
Du grand géant Saint-Isaac.

Timidement les nuages se levaient
Sur le ciel nocturne, hivernal,
Dans un silence de mort le fleuve pâle
Luisait de ses eaux gelées.

Et j’ai songé, triste et silencieux,
Qu’en des pays de soleil brûlant,
La baie de Gênes en cet instant
Flamboyait de tous ses feux.

O toi, Nord, Nord-sorcier,
Suis-je donc par toi envoûté ?
Ou suis-je vraiment enchaîné
Au froid granit de tes contrées ?

Ah, si un souffle, en passant,
Doucement dans le soir incertain,
M’emportait, m’emportait au loin,
Là-bas, là-bas, vers le Sud brûlant…


Fiodor Tiouttchev

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Oh, objet désiré

3 Novembre 2024, 01:51am

Publié par vertuchou

Oh, objet désiré de ma douce flamme !
Je respire enfin l’air que tu respires.
Où que je tourne mon regard,
ce sont tes traits charmants
que l’amour peint en moi,
et mes pensées forment
les plus belles espérances.
Dans le désir qui emplit mon cœur,
je te cherche, je t’appelle, j’espère et soupire !

Ranieri de Calzabigi  

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Je me tiens

29 Octobre 2024, 01:56am

Publié par vertuchou

Je me tiens
là où le bleu de la mer
est sans limites

Taneda Santoka

 

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Les nymphes

25 Octobre 2024, 01:52am

Publié par vertuchou

Oui, des lèvres aussi, des lèvres savoureuses
Mais d’une chair plus tendre et plus fragile encor
Des rêves de chair rose à l’ombre des poils d’or
Qui palpitent légers sous les mains amoureuses.

Des fleurs aussi, des fleurs molles, des fleurs de nuit,
Pétales délicats alourdis de rosée
Qui fléchissent, pliés sur la fleur épuisée,
Et pleurent le désir, goutte à goutte, sans bruit.

Ô lèvres, versez-moi les divines salives
La volupté du sang, la chaleur des gencives
Et les frémissements enflammés du baiser

Ô fleurs troublantes, fleurs mystiques, fleurs divines,
Balancez vers mon coeur sans jamais l’apaiser,
L’encens mystérieux des senteurs féminines.

Pierre Louÿs

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