L’arbre est un paysage
L’arbre est un paysage
dont les branches se dressent
comme une grande voile
sur la chevelure infinie
des nuages et du vent…
Victor Varjac
Coups de cœur
L’arbre est un paysage
dont les branches se dressent
comme une grande voile
sur la chevelure infinie
des nuages et du vent…
Victor Varjac
Il est comme un nuage
qui marche dans le ciel.
Il ne sait pourquoi,
et il ne sait comment.
Il est un nuage
qui cherche de la pluie,
et ne sait pas pleurer ;
il est sans tonnerre, ni éclair.
Il est fait de brumes,
de musiques nostalgiques ;
sans vision, ni espoir,
ses traces sont légères.
Il est comme un nuage
parce qu’il n’ose pas encore.
Il ignore que ses ailes
viennent de l’intérieur.
Chloé Douglas
Il n’y a pas d’amour seul
l’amour est un alliage
l’amour n’est pas du corps
l’amour est des corps
L’amour est un chant
des corps qui reposent
dans le rythme musical
avec le duo cosmique
L’amour est du point du jour le diamant
non de pierre
mais de facettes brillantes
qui éveillent les extases
Mina Loy
Celle que j'aime habite un miroir
Comment pourrais-je la rejoindre
Dans ce fracas d'astres glacés
Moi qui n'ai pas trop de silence
Pour ne ressembler qu'à moi-même
Aux marches blanches du sommeil
Glisserai-je ombre sans mémoire
Vers ce château de solitude
Défendu par tant d'oiseaux noirs
Pour monter jusqu'à son sourire
Sans déranger cette eau profonde
Qui le préserve de mourir
Il me faudrait être la nuit
Et ne plus savoir d'où je viens
Marcel Béalu
Pauvre je ne peux pas vivre dans l’ignorance
Il me faut voir entendre et abuser
T’entendre nue et te voir nue
Pour abuser de tes caresses
Par bonheur ou par malheur
Je connais ton secret par cœur
Toutes les portes de ton empire
Celle des yeux celle des mains
Des seins et de ta bouche où chaque langue fond
ET la porte du temps ouverte entre tes jambes
La fleur des nuits d’été aux lèvres de la foudre
Au seuil du paysage où la fleur rit et pleure
Tout en gardant cette pâleur de perle morte
Tout en donnant ton cœur tout en ouvrant tes jambes
Tu es comme la mer tu berces les étoiles
Tu es le champ d’amour tu lies et tu sépares
Les amants et les fous
Tu es la faim le pain la soif l’ivresse haute
Et le dernier mariage entre rêve et vertu.
Paul Eluard
[...]
D’ici bouge la lumière. Regarde
le vide lourd sur l’épaule
éparpillé parmi les fenêtres.
Cherche ce que tu appelles, l’impossible
mosaïque silencieuse du voyage
et la lampe qu’on dirait brûlée
par le temps. Regarde seulement la pièce
où résonne ta vie. L’ombre jamais vue
visible maintenant, dans les yeux du soir.
[...]
Hélène Dorion
La nuit cambrée de tes folies
Le jardin clos de nos je t’aime
Une tiédeur où je me plie
Et… Tout ce qui ne se dit pas
Ta lèvre au vert d’où j’émigre
A l’autre bout de tes pensées
Nos pôles au sud en tête à tête
A l’indécence des idées
Ta symphonie qui me rappelle
L’autre rivage sous ta voix
A mes délires à tes pluriels
Dans un voyage au long de toi
Ton souffle tendre où je m’enlise
L’aigre douceur dont tu te pares
Lorsque ton vin m’italianise
Quand tout s’allume sous ton fard
Ton alphabet quand tu m'emmènes
Les mots mouillés qui m’acheminent
Au temple chaud de nos haleines
Au figuré comme une rime
Mon Alpe blanche
Mon altitude
Où je me penche à l’infini…
Au point virgule de tes hanches
Ta vérité comme l’on dit
Des mots voyants de ta lumière
Qui ne sont pas au dictionnaire
Et… Tout ce qui ne se dit pas
...
Jacques Gourvennec
Au fond j’ai toujours su
Que j’atteindrais l’amour
et que cela serait
un peu avant ma mort.
J’ai toujours eu confiance,
Je n’ai pas renoncé
Bien avant ta présence,
Tu m’étais annoncée.
Voilà, ce sera toi,
Ma présence effective,
je serai dans la joie
de ta peau non fictive.
Michel Houellebecq
Il ne sera plus
nous ne vivrons pas ensemble
je n'élèverai pas ton fils
ne coudrai pas tes vêtements
ne t'aurai pas la nuit
ne t'embrasserai pas quand je m'en aille
tu ne sauras jamais qui j'ai été
pour quoi d'autres m'ont aimé.
Je n'arriverai à savoir
pour quoi ni comment jamais
ni s'il était vrai
ce que tu as dit qu'il était
ni qui tu as été
ni ce que j'ai été pour toi
ni comment il aurait été
vivre ensemble
nous aimer
nous attendre
être.
Je ne suis plus que moi
pour toujours et toi
tu ne seras plus que toi
pour moi. Tu n'es plus
dans un jour prochain
je ne saurai où tu habites
avec qui
ni si tu te souviens
Tu ne m'embrasseras jamais
comme cette nuit-là
jamais.
Il ne reviendra à te toucher.
Je ne te verrai mourir.
Idea Vilariño
________
Ya no
Ya no será
ya no
no viviremos juntos
no criaré a tu hijo
no coseré tu ropa
no te tendré de noche
no te besaré al irme
nunca sabrás quién fui
por qué me amaron otros.
No llegaré a saber
por qué ni cómo nunca
ni si era de verdad
lo que dijiste que era
ni quién fuiste
ni qué fui para ti
ni cómo hubiera sido
vivir juntos
querernos
esperarnos
estar.
Ya no soy más que yo
para siempre y tú
ya
no serás para mí
más que tú. Ya no estás
en un día futuro
no sabré dónde vives
con quién
ni si te acuerdas.
No me abrazarás nunca
como esa noche
nunca.
No volverá a tocarte.
No te veré morir.
Cette lumière est celle de l’esprit, froide et planétaire,
Et bleue. Les arbres de l’esprit sont noirs.
L’herbe murmure son humilité, dépose son fardeau de peine
Sur mes pieds comme si j’étais Dieu.
Une brume capiteuse s’est installée en ce lieu
Qu’une rangée de pierres tombales sépare de ma maison.
je ne vois pas du tout où cela peut mener.
La lune n’offre aucune issue, c’est un visage morne
D’une blancheur d’os effroyable.
Elle traîne derrière elle l’océan comme un crime obscur ; elle est calme,
Trou béant de désespoir total. J’habite ici.
Deux fois tous les dimanches les cloches ébranlent le ciel —
Huit langues puissantes annoncent la Résurrection.
À la fin, seul vibre le son grave de leur renommée.
Le cyprès se dresse alors, gothique.
Aux yeux levés sur lui, il désigne la lune.
La lune est ma mère. Elle n’a pas la patience de Marie.
Son vêtement bleu laisse échapper chauve-souris et hiboux.
Je voudrais tellement pouvoir croire à la tendresse —
Au visage de cette effigie, adouci par la lueur des cierges,
Qui poserait sur moi son regard bienveillant.
Je suis tombée de trop haut. Des nuages fleurissent,
Mystiques et bleus, à la face des étoiles.
Dans l’église les saints doivent être tout bleus,
À frôler les bancs glacés de leurs pieds délicats,
Et leurs mains et leur visage tout engourdis de sainteté.
La lune ne voit rien de tout cela. Elle est chauve, elle est cruelle.
Et le message du cyprès n’est que ténèbres — ténèbres et silence.
Sylvia Plath