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emois

Bonheur

17 Novembre 2015, 04:42am

Publié par vertuchou

Et elle se mit à rire de nouveau, de son rire de pluie fraîche.
Maintenant qu'il l'avait rejointe, elle marchait à côté de lui
d'un bon pas. Grange la regardait quelquefois à la dérobée ;
derrière le bord du capuchon, il ne voyait que le nez et la bouche,
tout vernissés d'eau, que le court menton buté tendait à la pluie,
mais il était remué de la sentir auprès de lui, jeune et saine,
souple comme un faon, dans la bonne odeur de laine mouillée.
D’elle-même elle s'était mise à son pas : c'était doux comme si
elle se fût appuyée sur lui. Parfois elle tournait un peu la tête,
et faisait glisser un instant le bord du capuchon sombre
sur ses yeux couleur d’éclaircie, leurs regards se croisaient,
et ils riaient un peu sans rien dire, d'un rire de pur contentement.

Julien Gracq, Un balcon en forêt

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Je voudrais sentir vos seins nus

31 Octobre 2015, 04:34am

Publié par vertuchou

Je voudrais sentir vos seins nus sur ma poitrine,

mes deux mains croisées sur vous, vos bras autour de mon cou,

votre tête parfumée dans le creux de mon épaule,

et votre peau palpitante, et l’odeur qui vient de vous.

- Boris Vian, L'écume des jours,

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Etait-il vrai ... ?

28 Octobre 2015, 04:12am

Publié par vertuchou

Etait-il vrai que la couleur des yeux changeait pendant l’amour, ainsi que la taille

et le pigment des aréoles, lesquelles secrétaient un doux nectar semblable à du miel ?

Etait-il vrai que le Mont de Vénus, soumis à une douce et régulière pression, s’exhaussait

sous le désir ?

Etait-il vrai que la peau s’irisait le long du dos, que la chair de poule naissait

sur les courbures les plus intimes ?

Etait-il vrai que les chevilles se cambraient, que les orteils s’arc-boutaient,

que les doigts se creusaient dans un mouvement de supination, que le corps entier

se métamorphosait pour célébrer Eros ?

Blanc-seing

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Je touche tes lèvres

12 Octobre 2015, 04:29am

Publié par vertuchou

Je touche tes lèvres, je touche d’un doigt le bord de tes lèvres,
je dessine ta bouche comme si elle naissait de ma main,
comme si elle s’entrouvrait pour la première fois,
et il me suffit de fermer les yeux pour tout défaire et tout recommencer,
je fais naître chaque fois la bouche que je désire,
la bouche que ma main choisit et qu’elle dessine sur ton visage,
une bouche choisie entre toutes, choisie par moi
avec une souveraine liberté pour la dessiner de ma main
sur ton visage et qui, par un hasard que je ne cherche pas à comprendre,
coïncide exactement avec ta bouche qui sourit sous la bouche
que ma main te dessine.

Tu me regardes, tu me regardes de tout près,
tu me regardes de plus en plus près, nous jouons au cyclope,
nos yeux grandissent, se rejoignent, se superposent,
et les cyclopes se regardent, respirent confondus,
les bouches se rencontrent, luttent tièdes avec leurs lèvres,
appuyant à peine la langue sur les dents,
jouant dans leur enceinte où va et vient un air pesant
dans un silence et un parfum ancien.


Alors mes mains s’enfoncent dans tes cheveux,
caressent lentement la profondeur de tes cheveux,
tandis que nous nous embrassons
comme si nous avions la bouche pleine de fleurs ou de poissons,
de mouvements vivants, de senteur profonde.
Et si nous nous mordons, la douleur est douce
et si nous sombrons dans nos haleines mêlées en une brève et terrible noyade,
cette mort est instantanée et belle.
Et il y a une seule salive et une seule saveur de fruit mûr,
et je te sens trembler contre moi comme une lune dans l’eau.

Julio Cortázar, Marelle

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Je fais tout ce que je peux

4 Octobre 2015, 04:09am

Publié par vertuchou

"Je fais tout ce que je peux pour que mon amour ne te dérange pas.
Je te regarde à la dérobée.
Je te souris quand tu ne me vois pas.
Je mets mon regard et mon âme partout
où je voudrais mettre mes baisers :
dans tes cheveux, sur ton front, sur tes yeux, sur tes lèvres,
partout où les caresses ont un libre accès…”

Juliette Drouet, Lettres à Victor Hugo

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J’éprouvais alors - la seule fois de ma vie -

23 Septembre 2015, 04:33am

Publié par vertuchou

“J’éprouvais alors - la seule fois de ma vie - le désir total d’une femme

où tout mon être était engagé corps et âme, concupiscence et tendresse,

chagrin et furieux goût de vivre, fringale de vulgarité comme de réconfort,

soif d’une seconde de plaisir comme d’éternelle possession.

J’étais entièrement engagé, tendu, concentré et je me souviens

de ces moments comme d’un paradis perdu.”


Milan Kundera, La plaisanterie

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Publié depuis Overblog

10 Septembre 2015, 03:40am

Publié par vertuchou

Quel goût avait-elle, ta bien-aimée ? s’enquièrent les 26 lettres du seul alphabet que l’on m’eût jamais appris et dans quel ordre nous rangerais-tu, toi, si tu nous mettais au défi de le lui apprendre ?
Nid d’hirondelle. Figue tiède. Abricot trop mûr. Minuscule framboise gobée sous un crachin serré.
Quelquefois, dérayure. Quelquefois, écorchures de marées, saignées de l’âme et sang de lune. Ou laitance. Ou lactescence. Colostrum d’Aphrodite.
Oh, Mathilde,
Je renonce.
Je t’ai aimée.
Je t’ai plus aimée que je le saurais le dire,
Et beaucoup moins bien.


Anna Gavalda, La vie en mieux

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Un enchantement les tenait enfermés dans le secret de leur rencontre

25 Août 2015, 04:24am

Publié par vertuchou

C'était un devenir. Un futur implacable leur était échu.

Qu'ils résistent, qu'ils lâchent prise, ils allaient s'y engouffrer. Ils tremblaient au seuil de l'intimité. Ils tremblaient parce qu'ils le savaient. Ils étaient ensemble la proie d'un destin amoureux, et peut-être le plus étrange n'était-il pas ce destin lui-même, mais cette connaissance qu'ils en avaient, et la façon dont, pour ce destin là, la prescience ne leur servait à rien.

Un enchantement les tenait enfermés dans le secret de leur rencontre, dans ce côtoiement inéluctable, et dans leur liberté. Une turbulence les précipitait l'un vers l'autre.

Alice Ferney, La conversation amoureuse

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On dirait que ton nom est écrit dans l'air

20 Août 2015, 03:55am

Publié par vertuchou

On dirait que ton nom est écrit dans l'air. Tu sens bon.

Tu es somptueuse et douce.

Tu es inaccessible, et très proche, et tout menue.

Tu es une belle femme que l'on désire, et une petite fille que l'on est tout étonné

de trouver dans ses bras.

- Antonin Artaud, Lettres à Genica

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Jamais je n'avais regardé ses yeux de si près

17 Août 2015, 04:03am

Publié par vertuchou

Jamais je n'avais regardé ses yeux de si près.
Ils étaient d'un brun foncé, presque aussi sombres que leur pupille. Je ne pourrais pas écrire que je la regardais au fond des yeux car ces yeux-là n'avaient pas de fond. Ils n'étaient qu'une surface noire, désespérément opaque, des yeux inhumains, de rapace ou de lynx, d'une dureté de marbre ou de météorite, des yeux qui me regardaient mais ne me voyaient pas, qui ne m'aimaient pas, qui ne m'aimeraient jamais, qui n'aimaient ni n'aimeraient jamais personne, des yeux d'un autre monde.
Dominique Noguez, Amour noir

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