Coups de cœur
les pommiers aboient / The apple trees are barking
Les pommiers aboient
les piqûres d'abeille sur mon crâne
marquent la fureur de l'essaim
retiens, mon cœur, ta douceur.
Le ciel enfonce ses pouces
dans mes yeux
ses constellations s'enfuient
retiens, mon cœur, ta douceur.
La pluie incessante
qui veut changer en sable les montagnes
me prépare pour le lit
retiens, mon cœur, ta douceur.
John Berger
The apple trees are barking
the beestings on my scalp
mark the rage of the swarm
hold, my honey, your sweetness.
The sky is pressing its thumbs
into my eyes
his constellations are fleeing
hold, my honey, your sweetness.
The endless rain
desiring the mountains as sand
is preparing me for bed
hold, my honey, your sweetness.
Vertige
Stances
Avez-vous vu la tendre rose,
L'aimable fille d'un beau jour,
Quand au printemps à peine éclose,
Elle est l'image de l'amour ?
Telle à nos yeux, plus belle encore,
Parut Eudoxie aujourd'hui :
Plus d'un printemps la vit éclore,
Charmante et jeune comme lui.
Mais, hélas ! les vents, les tempêtes
Ces fougueux enfants de l'hiver,
Bientôt vont gronder sur nos têtes,
Enchaîner l'eau, la terre et l'air.
Et plus de fleurs et plus de rose,
L'aimable fille des amours
Tombe fanée, à peine éclose :
Il a fui, le temps des beaux jours !
Eudoxie, aimez ! Le temps presse ;
Profitez de vos jours heureux
Est-ce dans la froide vieillesse
Que de l'amour on sent les feux !
Alexandre Pouchkine
Lettre d'Edith Piaf à Louis Gérardin, alias Toto
Le 6 février 1952
Toi mon amour,
Pourquoi je t’aime tellement ?
Que m’as-tu fait ?
Pourquoi ai-je toujours envie d’être sous toi, sur toi, à toi ?
Pourquoi la nuit ai-je envie de crier tant ma peau a besoin de la tienne ?
Pourquoi ne puis-je plus dormir ?
Pourquoi m’as-tu fait connaître l’amour ?
Pourquoi me domines-tu de tout toi ?
Pourquoi ne puis-je vivre sans toi ?
Pourquoi ai-je besoin de ton odeur ; de ta voix pleine d’amour ?
Pourquoi ai-je envie de me jeter nue contre ton corps nu ?
Pourquoi ai-je envie d’avoir mal par toi ?
Pourquoi les angoisses et les joies de mon cœur ?
Pourquoi es-tu mon maître ?
Pourquoi ne puis-je être heureuse que par toi ?
Pourquoi ce gouffre devant moi quand tu n’es pas là ?
Pourquoi ? … Pourquoi ? … Pourquoi ? ….
Parce que tu existes et que sans toi je serais morte sans connaître l’amour ?
Et puis aussi parce que tu es merveilleux ?
Oui mais… pourquoi m’aimes-tu toi ?
Ton petit bout
N’oublie pas, mon amour
N’oublie pas, mon amour.
Le paradoxe du parfum, c’est qu’il libère ce qu’il capture.
Capture la vie et libère-la.
Capture les odeurs de la vie et libère-les.
Qu’elles jaillissent de tes paumes, de tes hanches,
de tes yeux vifs à tout saisir,
mourants lorsque tu t’abandonnes.
Lyonel Trouillot
Dames d'honneur
Le soir
La joie bruyante des hommes s'est tue.
Au murmure merveilleux des bois
Et de la plaine qui chante comme en rêve
Mon coeur -qui l'avait presque oublié-
Revit le passé doux et triste.
Des frissons légers passent sur mon âme
Comme des éclairs d'orages dans la nuit.
Joseph Karl Benedikt von Eichendorff
Schweigt der Menschen laute Lust :
Rauscht die erde wie in Träumen
Wunderbar mit allen Bäumen?
Was dem Hertzen Kaum bewusst,
Alte Zeiten, linde Trauer,
Und es schweifen leise Schauer
Wetterleuchtend durch die Brust.
La poésie doit
La poésie doit venir aussi naturellement que les feuilles aux arbres, ou ne pas venir.
John Keats
Paris by night
Trois allumettes une à une allumées dans la nuit
La première pour voir ton visage tout entier
La seconde pour voir tes yeux
La dernière pour voir ta bouche
Et l'obscurité tout entière pour me rappeler tout cela
En te serrant dans mes bras.
Jacques Prévert