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poetes d'aujourd'hui

Une voix

17 Août 2012, 05:12am

Publié par vertuchou

Ecoute-moi revivre dans ces forêts
Sous les frondaisons de mémoire
Où je passe verte,
Sourire calciné d'anciennes plantes sur la terre,
Race charbonneuse du jour.

Ecoute-moi revivre, je te conduis
Au jardin de présence,
L'abandonné au soir et que les ombres couvrent,
L'habitable pour toi dans le nouvel amour.

Hier règnant désert, j'étais feuille sauvage
Et libre de mourir,
Mais le temps mûrissait, plainte noire des combes,
La blessure de l'eau, dans les pierres du jour.

Yves Bonnefoy

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Avevo vent'anni, neanche / J’avais vingt ans, même pas

13 Août 2012, 05:09am

Publié par vertuchou

(...)

Avevo vent'anni, neanche - diciotto,
diciannove... ed era già passato un secolo
dacché ero vivo, una intera vita

consumata al dolore dell'idea
che non avrei mai potuto dare il mio amore
se non alla mia mano, o all'erba dei fossi,

o magari al terriccio di una tomba incustodita...
Vent'anni, e, con la sua storia umana, e il suo ciclo
di poesia, era conclusa una  vita.   

Pier Paolo Pasolini


J’avais vingt ans, même pas –dix-huit,
dix-neuf…et déjà un siècle était passé
depuis que je vivais une vie entière

consumée à la douleur de penser
que je ne pourrais jamais donner mon amour,
sinon à ma main, ou à l’herbe des fossés,

au terreau d’une tombe sans surveillance…
Vingt ans et, avec son histoire humaine, avec son cycle
De poésie, une vie était close.

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Il existe un pays

5 Août 2012, 05:14am

Publié par vertuchou

Il existe un pays, plutôt une frontière,
Où la lumière est douce et pratiquement solide
Les êtres humains échangent des fragments de lumière,
Mais il n'ont pas la moindre appréhension du vide.
La parabole du désir
Remplissait nos mains de silence
Et chacun se sentait mourir,
Nos corps vibraient de ton absence.
Nous avons traversé des frontières de craie
Et le second matin le soleil devint proche
Il y avait dans le ciel quelque chose qui bougeait,
Un battement très doux faisait vibrer les roches.
Les gouttelettes de lumière
Se posaient sur nos corps meurtris
Comme la caresse infinie
D'une divinité - matière

 

Michel Houellebecq

 

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Le complice

31 Juillet 2012, 05:08am

Publié par vertuchou

On me crucifie et je dois être la croix et les clous.
On me tient la coupe et
On me trompe et je dois être le mensonge.
On m’incendie et je dois être l’enfer.
Je dois flatter et remercier chaque instant du temps.
Mon aliment est toute chose.
Le poids précis de l’univers, l’humiliation, la joie.
Je dois justifier ce qui me blesse.
Peu importe mon bonheur ou mon malheur.
Je suis le poète.

Jorge Luis Borges

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Aimer c’est agoniser

27 Juillet 2012, 05:15am

Publié par vertuchou

Aimer c’est agoniser
aimer c’est aimer mourir
les singes puent en mourant
assez je me voudrais mort
je suis trop mou pour cela
assez je suis fatigué
assez je t’aime comme un fêlé
je ris de moi l’âne d’encre
brayant aux astres du ciel
nue tu éclatais de rire
géante sous le baldaquin
je rampe afin de n’être plus
je désire mourir de toi
je voudrais m’anéantir
dans tes caprices malades

Georges Bataille

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TUTUGURI LE RITE DU SOLEIL NOIR

24 Juillet 2012, 05:44am

Publié par vertuchou

Et en bas, comme au bas de la pente amère,
cruellement désespérée du cœur,
s'ouvre le cercle des six croix,
                                 très en bas,
comme encastré dans la terre mère,
désencastré de l'étreinte immonde de la mère
                                qui bave.

La terre de charbon noir
est le seul emplacement humide
dans cette fente de rocher.

Le Rite est que le nouveau soleil passe par sept points
              avant d'éclater à l'orifice de la terre.

Et il y a six hommes,
un pour chaque soleil,
et un septième homme
qui est le soleil tout
                            cru
habillé de noir et de chair rouge.

Or, ce septième homme
est un cheval,
un cheval avec un homme qui le mène.

Mais c'est le cheval
qui est le soleil
et non l'homme.

Sur le déchirement d'un tambour et d'une trompette
                                 longue,
étrange,
les six hommes
qui étaient couchés,
roulés à ras de terre,
jaillissent successivement comme des tournesols,
non pas soleils mais sols tournants,
des lotus d'eau,
et à chaque jaillissement
correspond le gong de plus en plus sombre
                          et rentré
                          du tambour
jusqu'à ce que tout à coup on voie arriver au grand galop,
avec une vitesse de vertige,
le dernier soleil,
le premier homme,
le cheval noir avec un
                        homme nu,
                        absolument nu
                        et vierge
                        sur lui.

Ayant bondi, ils avancent suivant des méandres circulaires
et le cheval de viande saignante s'affole
et caracole sans arrêt
au faîte de son rocher
jusqu'à ce que les six hommes
aient achevé de cerner
complètement
les six croix.

Or, le ton majeur du Rite est justement

L'ABOLITION
DE LA CROIX.

Ayant achevé de tourner
ils déplantent
les croix de terre
et l'homme nu
sur le cheval
arbore
un immense fer à cheval
qu'il a trempé dans une coupure de son sang.

Antonin Artaud

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La nuit

20 Juillet 2012, 05:29am

Publié par vertuchou

Je connais si peu de la nuit
mais la nuit semble bien me connaître,
et plus encore elle m’assiste comme si je le désirais,
elle recouvre l’existence avec ses étoiles.
Peut-être la nuit est-elle la vie et le soleil la mort.
Peut-être que la nuit n'est rien,
toute conjecture à ce sujet n’est rien
et rien les êtres qui l’ont vécu.
Peut-être que les mots seraient tous là uniques
dans l’immense vide des siècles,
on fouaille l’âme avec leurs souvenirs
mais la nuit sait la misère
qui boit notre sang et nos idées,
elle doit vomir nos regards
sachant notre trop plein d’intérêt et de confusion.
Mais il se peut que j'entende pleurer la nuit dans mes os.
Ses immenses larmes délirantes
et ses cris parce que quelque chose s’en est allé depuis toujours.
Redevenir encore une fois un être.

Alejandra Pizarnik

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L'oiseau bleu

17 Juillet 2012, 04:52am

Publié par vertuchou

Mon oiseau bleu a le ventre tout bleu
Sa tête est d'un vert mordoré
Il a une tache noire sous la gorge
Ses ailes sont bleues avec des touffes de petites plumes jaune doré
Au bout de la queue il y a des traces de vermillon
Son dos est zébré de noir et de vert
Il a le bec noir les pattes incarnat et deux petits yeux de jais
Il adore faire trempette se nourrit de bananes et pousse un petit cri qui ressemble
au sifflement d'un tout petit jet de vapeur
On le nomme le septicolore

Blaise Cendrars

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le baiser

13 Juillet 2012, 05:46am

Publié par vertuchou

Toute tiède encore du linge annulé

Tu fermes les yeux et tu bouges

Comme bouge un chant qui naît

Vaguement mais de partout.

  
Odorante et savoureuse

Tu dépasses sans te perdre

Les frontières de ton corps

 
Tu as enjambé le temps

Te voici femme nouvelle

Révélée à l’infini.

 

 

Paul Eluard

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Poèmes de sable

10 Juillet 2012, 09:15am

Publié par vertuchou

J’ai dormi au bord
Des anses de ta beauté
Effleurant de mon souffle
tes îles craintives
À demi submergées
Tes collines sauvages
Tes prairies ponctuées
de battements ailés

Les marées impassibles
Ne faisaient que bercer
Ton sommeil assiégé
Par les algues marines
Tes mains avaient goût
De sel et de sable
De même que ton visage
Où tes larmes séchaient

Marcel Dubé

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