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poetes d'aujourd'hui

Chant funèbre / Funeral Blues

2 Décembre 2014, 04:04am

Publié par vertuchou

Arrêtez les pendules, coupez le téléphone,
Faites taire le chien d’un os gras qu’on lui donne,
Silence les pianos ! Sourdine, les tambours
Pour sortir le cercueil entre tout ces cœurs lourds..

Que les aéroplanes voltigeant au dehors
dessinent ces trois mot : Il Est Mort.
Mettez du crêpe noir aux cous blancs des pigeons,
aux mains des policiers des gants noirs en coton.

Il était mon Nord, mon Sud, mon Est, mon Ouest,
ma semaine affairée, mon dimanche de sieste,
mon midi, mon minuit, mes mots et ma chanson.
Je pensais que l'amour ne finirait jamais : eh bien non.

Plus besoin des étoiles et que, tous, ils s’en aillent
envelopper la lune, démonter le soleil
assécher l'océan, arracher les forêts
car ici rien d’heureux n’adviendra plus jamais.

--------------------

Stop all the clocks, cut off the telephone,
Prevent the dog from barking with a juicy bone,
Silence the pianos and with muffled drum
Bring out the coffin, let the mourners come.


Let aeroplanes circle moaning overhead
Scribbling on the sky the message He Is Dead,
Put crepe bows round the white necks of the public doves,
Let the traffic policemen wear black cotton gloves.


He was my North, my South, my East and West,
My working week and my Sunday rest,
My noon, my midnight, my talk, my song;
I thought that love would last for ever: I was wrong.


The stars are not wanted now: put out every one;
Pack up the moon and dismantle the sun;
Pour away the ocean and sweep up the wood.
For nothing now can ever come to any good.

Wystan Hugh Auden

traduction Yves Perret

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Le silence est un message de l’ombre

28 Novembre 2014, 04:00am

Publié par vertuchou

le silence est un message de l’ombre
qui ne franchit aucun seuil et se nourrit
de la lumière et de son absence

le silence est un signe quand la parole
fait erreur ou reste inachevée

le silence est un jardin du ciel
qui adresse au ciel une prière muette
en forme de paysage

le silence est une question
posée à la question

le silence est la maison où habite le poème
où il prend corps
tout en se condamnant au silence

le silence est une musique dont les notes
sont les planètes et leurs étoiles

le silence est une saison où mûrit le fruit
d’un poème sans mots

le silence est une vibration de l’immobile
un chant à naître dans la gorge
d’oiseaux en forme de voyelles

le silence est une errance
qui indique discrètement le chemin
au milieu du chemin

le silence est la main qui ouvre le poème
la voix tremblée de l’âme d’où surgit
ce que nous sommes et ne sommes pas

le silence est le rêve de l’être qui rêve
sa naissance d’avant sa naissance
et tait son premier cri

le silence est le miroir qui lave la parole
dans l’eau la plus nue de la parole

le silence est un miracle inachevé
où le monde prend forme d’un seul coup

Amina Saïd

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Dédicace / Widmung

26 Novembre 2014, 04:44am

Publié par vertuchou

Je ne vous écris pas de lettres,
mais il me serait facile de mourir avec vous.
Doucement, nous nous laisserions glisser
le long des lunes, une première halte
auprès des cœurs de laine, puis
une autre parmi les loups, les framboisiers
et ce feu que rien n'apaise ; à la troisième,
j'aurais traversé les fines mousses
des nuages raréfiés,
passé sans effort le pauvre fourmillement
des étoiles, pour arriver
dans votre ciel, tout près de vous.

----

Ich schreibe euch keine Briefe,
aber es wäre mir leicht, mit euch zu sterben.
Wir liessen uns sacht die Monde hinunter
und läge die erste Rast noch
bei den wollenen Herzen, die zweite
fände uns schon mit Wölfen und Himbeergrün

und dem nichts lindernden Feuer, die dritte,
da wär ich durch das fallende dünne Gewölk
mit seinen spärlichen Moosen
und das arme Gewimmel der Sterne,
das wir so leicht überrschritten,
in eurem Himmel bei euch.

Ilse Aichinger

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J’aime quand tu te tais, parce que tu es comme absente

22 Novembre 2014, 04:34am

Publié par vertuchou

J’aime quand tu te tais, parce que tu es comme absente,
et tu m’entends au loin, et ma voix ne t’atteint pas.
On dirait que tes yeux se sont envolés,
et on dirait qu’un baiser t’a clos la bouche.

Comme toutes les choses sont remplies de mon âme,
tu émerges des choses pleine de mon âme.
Papillon de rêve, tu ressembles à mon âme
et tu ressembles au mot : mélancolie.

J’aime quand tu te tais et que tu es comme distante.
Et tu es comme plaintive, papillon que l’on berce.

Et tu m’entends au loin, et ma voix ne t’atteint pas :
laisse-moi me taire avec ton silence.

Laisse-moi aussi te parler avec ton silence,
clair comme une lampe, simple comme un anneau.
Tu es comme la nuit, silencieuse et constellée.
Ton silence est d’étoile, si lointain et si simple.

J’aime quand tu te tais, parce que tu es comme absente,
distante et dolente, comme si tu étais morte.
Un mot alors, un sourire suffisent,
et je suis heureux, heureux que ce ne soit pas vrai.

Pablo Neruda

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Poème à l’envers

16 Novembre 2014, 04:18am

Publié par vertuchou

À l’ombre, sous les platanes roux,
À Londres, tristement assis sur un banc
J’écourte ces discours douloureux,
J’écoute chaque jour mon cœur las et triste.

« Je pars, c’est fini. Je t’aime. »
Je parvins à saisir ces mots murmurés :
Assis près de toi, l’âme déchirée,
À six heures, l’heure ultime.

Fragments d’un être brisé,
Fragiles phrases aux rimes égarées,
Souvenirs volatiles sans destination,
Soupirs inexprimables d’une passion.

Las, malgré l’automne qui flamboie
Là, un homme, seul, dans un précoce hiver.
Il était une fois
Un poème à l’envers…

William Taurus

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Après l’Homme

12 Novembre 2014, 04:02am

Publié par vertuchou

Après l’Homme, après l’Homme,
Qui dira aux fleurs comment elles se nomment ?
Après l’Homme, après l’Homme,
quand aura passé l’heure de vie du dernier Homme.

Qui dira aux fleurs
combien elles sont belles ?
N’y aura de cœur
à battre pour elles.

Après l’Homme, après l’Homme,
que sera encore le mot “merveilleux” ?
Après l’Homme, après l’Homme,
quand le dernier des hommes aura vidé les lieux.

Qui dira de la Terre
Qu’elle est sans pareille
et que dans l’Univers
elle est fleur de Soleil ?

Après l’Homme, après l’Homme…

Viens-t’en donc pour lors,
viens-t’en donc l’ami,
et chantons encore
le jour d’aujourd’hui.

Esther Granek

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La mort, la vie, l'amour

8 Novembre 2014, 04:57am

Publié par vertuchou

J'ai cru pouvoir briser la profondeur de l'immensité
Par mon chagrin tout nu sans contact sans écho
Je me suis étendu dans ma prison aux portes vierges
Comme un mort raisonnable qui a su mourir
Un mort non couronné sinon de son néant
Je me suis étendu sur les vagues absurdes
Du poison absorbé par amour de la cendre
La solitude m'a semblé plus vive que le sang


Je voulais désunir la vie
Je voulais partager la mort avec la mort
Rendre mon cœur au vide et le vide à la vie
Tout effacer qu'il n'y ait rien ni vitre ni buée
Ni rien devant ni rien derrière rien entier
J'avais éliminé le glaçon des mains jointes
J'avais éliminé l'hivernale ossature
Du vœu qui s'annule

Tu es venue le feu s'est alors ranimé
L'ombre a cédé le froid d'en bas s'est étoilé
Et la terre s'est recouverte
De ta chair claire et je me suis senti léger
Tu es venue la solitude était vaincue
J'avais un guide sur la terre je savais
Me diriger je me savais démesuré
J'avançais je gagnais de l'espace et du temps

J'allais vers toi j'allais sans fin vers la lumière
La vie avait un corps l'espoir tendait sa voile
Le sommeil ruisselait de rêves et la nuit
Promettait à l'aurore des regards confiants
Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard
Ta bouche était mouillée des premières rosées
Le repos ébloui remplaçait la fatigue
Et j'adorais l'amour comme à mes premiers jours.

Les champs sont labourés les usines rayonnent
Et le blé fait son nid dans une houle énorme
La moisson la vendange ont des témoins sans nombre
Rien n'est simple ni singulier
La mer est dans les yeux du ciel ou de la nuit
La forêt donne aux arbres la sécurité
Et les murs des maisons ont une peau commune
Et les routes toujours se croisent.

Les hommes sont faits pour s'entendre
Pour se comprendre pour s'aimer
Ont des enfants qui deviendront pères des hommes
Ont des enfants sans feu ni lieu
Qui réinventeront les hommes
Et la nature et leur patrie
Celle de tous les hommes
Celle de tous les temps.

Paul Eluard

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Tout redevient fragile

4 Novembre 2014, 04:58am

Publié par vertuchou

On finit par suivre la lumière
qui nous bouleverse parfois
à travers un geste
sentir que rien ne viendra
sinon quelque désastre

On finit par ne plus voir
les percées du vide, oublier
ce visage qui n’a jamais existé
ailleurs que devant

Plus rien n’est lié soudain
plus rien ne s’accomplit

On finit par répondre
qu’on est là, faire signe
parmi nos absences
ne plus fuir la mémoire
de certaines failles qui blessent
plus que d’autres

On finit par s’ouvrir
au silence qui revient
et ne plus répondre
au bruit des pas, ne plus croire
qu’on a aimé, soutenu un instant
la beauté de notre vie

On finit par sentir le temps
qui replie nos regards
lentement les referme, comme une blessure
dont on ne sait plus parler

On finit par guérir
des premières questions
restées sans réponse
dans un regard
on finit par poser un amour
sur ce manque sans fond
se dire qu’il y a quelqu’un
au bout des mots
qui battent encore en nous
on se souvient soudain
de ce qui fut approché, effleuré
du désir dans lequel nous jette un corps

On finit par répondre chaque fois
à ce qui peut encore venir
à travers la répétition
de nos manques et de nos tendresses
on finit par se souvenir
qu’il y eut quelqu’un
derrière le désastre

On finit par ne plus entendre
que ces mots accidentés
qui appellent sans relâche
ce qui jamais n’est venu
et jamais ne viendra

On finit par ne plus rien entendre
et cela nous atteint encore

Hélène Dorion

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L’Amour ne disparait jamais

1 Novembre 2014, 04:59am

Publié par vertuchou

La mort n’est rien, je suis seulement passé dans a pièce à côté.
Je suis moi.
Vous êtes vous.
Ce que j’étais pour vous, je le suis toujours.
Donnez-moi le nom que vous m’avez toujours donné.
Parlez-moi, comme vous l’avez toujours fait.
N’employez-pas un ton différent.
Ne prenez pas un air solennel ou triste.
Continuez a rire de ce qui nous faisait rire ensemble.
Priez ou ne priez pas souriez, pensez à moi.
Que mon nom soit prononcé a la maison comme il a toujours été.
sans emphase d’aucune sorte, sans aucune trace d’ombre.
La vie signifie tout ce qu’elle a toujours été.
Le fil n’est pas coupé.
Pourquoi serais-je hors de votre vue ?
Pourquoi serais-je hors de vos pensées ?
Je ne suis pas loin, juste de l’autre côté du chemin.

Paul Claudel

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Elle se penche sur moi

27 Octobre 2014, 04:11am

Publié par vertuchou

Elle se penche sur moi
Le cœur ignorant
Pour voir si je l'aime
Elle a confiance elle oublie
Sous les nuages de ses paupières
Sa tête s'endort dans mes mains
Où sommes-nous
Ensemble, inséparables
Vivants vivants
Vivant vivante
Et ma tête roule en ses rêves

Paul Eluard

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