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Coups de cœur
La poésie est le miroir
La poésie est le miroir brouillé de notre société.
Et chaque poète souffle sur ce miroir : son haleine différemment l'embue.
- Louis Aragon, Chronique du bel canto
Comment ça se danse
Viens
Allons
Viens
Je te dis
Qu’il faut y aller
Tant qu’il fait bon
Et clair
Laisse le feu
Il s’éteindra
Un rond
Noir dans la neige
On est passé là
On est passé
Quelqu’un se dira
Viens
Je te dis
Qu’il faut y aller
Tant qu’il fait bon
Marcher
Laisse l’eau fraîche
Couler
Elle coule bien
Demain
Nous dormirons au sec
Laisse le
Au bord du champ
Cet oiseau sans bec
Qui pense
Comment ça se danse
Comment ça se danse
Comment ça se danse
Comment ça se danse
Bertrand Belin
Air de la folie
Le nuage
J'apporte de fraîches averses pour les fleurs assoiffées,
Venues des mers et des fleuves;
Je répands une ombre légère sur les feuilles qui reposent
Dans leurs rêves de midi.
De mes ailes, je secoue la rosée qui éveille
Tous les charmants bourgeons,
Bercés et assoupis sur le sein de leur mère,
Quant elle danse devant le soleil.
Je brandis le fléau de la grêle,
Fouettant et blanchissant les vertes plaines plus bas,
Puis, à nouveau, je la dissous en pluie,
Et je ris quand je passe, apportant le tonnerre.
Je tamise la neige sur les monts au dessous,
Et leurs pins géants gémissent de terreur;
Et toute la nuit, c'est là mon blanc oreiller,
Tandis que je dors, dans les bras de la tempête.
Souverain, sur les tours de mes demeures aériennes
Se tient l'éclair, mon pilote;
Dans un antre inférieur est enchaîné le tonnerre;
Il se débat et rugit par accès;
Au-dessus de la terre et de l'océan, d'un mouvement doux
Ce pilote me guide,
Attiré par l'amour des génies qui hantent
Les profondeurs de la mer empourprée;
Par dessus les ruisseaux, les rochers, les collines,
Par dessus lacs et plaines,
Partout où il rêve que, sous monts ou rivières,
L'esprit qu'il aime demeure;
Et moi tout ce temps, je me baigne dans le sourire bleu du firmament,
Tandis qu'il se fond en pluie.
Le soleil levant écarlate, aux yeux de météore,
Aux plumes de flammes largements ouvertes,
Bondit sur mes vapeurs flottantes,
A l'heure où s'amortit l'éclat de l'étoile du matin;
Comme à la pointe d'un roc escarpé
Qu'un tremblement de terre ébranle et fait osciller,
Un aigle perché se repose un moment
Dans la lumière de ses ailes d'or.
Et quand le soleil couchant exhale, de la mer qu'il illumine
Ses feux où s'endort l'amour,
Et que le linceul rutilant du soir
Tombe des hauteurs du ciel,
Les ailes repliées, je repose sur mon nid aérien,
Aussi tranquille qu'une tourterelle qui couve.
Cette sphère vierge, rayonnante de flammes blanches,
Que les mortels appellent Lune
Glisse et luit sur ma toison
Éparpillée par les brises de minuit;
Et toutes les fois que ses invisibles pas
Entendus par les anges seulement,
Rompent la trame de ma mince tente,
Les étoiles regardent derrière elle à la dérobée;
Et je ris de les voir se mouvoir en cercle et fuir,
Comme un essaim d'abeilles dorées,
Quand j'élargis l'ouverture de ma tente, dressée par le vent;
Jusqu'à ce que les calmes rivières, les lacs et les mers,
Comme des rubans de ciel tombés de là-haut à travers moi,
Tous, miroitent sous la lune et sous les astres.
J'entoure le trône du Soleil d'une ceinture brûlante,
Et celui de la Lune d'une cordelière de perles;
Les volcans sont obscurs, les étoiles chancellent et tournoient
Quand les tourbillons déploient ma bannière.
D'un cap à l'autre, semblable à un pont,
Par dessus une mer torrentueuse,
Insensible aux rayons du soleil, je suspends ma voûte,
Dont les montagnes sont les colonnes.
L'arche triomphale à travers laquelle je m'avance
Avec la tempête, l'ouragan, le feu et la neige,
Quand les Puissances de l'air sont enchaînées à mon trône,
Est l'arc-en-ciel aux millions de couleurs;
Cette sphère de feu là-haut tissa ses changeantes teintes,
Tandis que la Terre humide riait au-dessous.
Je suis l'enfant de la Terre et de l'eau,
Et le nourrisson du Ciel;
Je passe à travers les mailles de l'océan et du rivage;
Je change, mais ne puis mourir.
Car, après la pluie, quand sans la moindre tache,
Le pavillon du ciel est dégagé,
Et que le vent, avec les rayons du soleil, de leurs reflets convexes,
Bâtissent le dôme bleu de l'air,
Je ris en silence de mon propre cénotaphe;
Et, des cavernes de la pluie,
Comme un enfant du sein maternel, comme un fantôme de la tombe,
Je me lève, et le détruis à nouveau.
Percy Bisshe Shelley
Vois-tu, notre amour est né
Vois-tu, notre amour est né d'une rencontre, du choc de nos regards,
de l'appel de nos chairs. Nous nous sommes frôlés pendant des jours
et des jours et chacun de nous avait l'intention qu'il fallait persévérer,
que le bonheur était là dans la fusion de nos deux êtres.
Nous nous sommes donnés avant de nous connaître et l'avenir nous a donné raison.
Depuis que nous sommes amants, nous n'avons jamais eu que de la joie ensemble
et notre possession mutuelle nous apporte des extases infinies.
Oui, restons nous deux, mon cher amour, rien que nous deux.
Mademoiselle S Lettres d'amour
Le bonheur
Le bonheur est dans le pré. Cours-y vite, cours-y vite.
Le bonheur est dans le pré, cours-y vite. Il va filer.
Si tu veux le rattraper, cours-y vite, cours-y vite.
Si tu veux le rattraper, cours-y vite. Il va filer.
Dans l'ache et le serpolet, cours-y vite, cours-y vite,
dans l'ache et le serpolet, cours-y vite. Il va filer.
Sur les cornes du bélier, cours-y vite, cours-y vite,
sur les cornes du bélier, cours-y vite. Il va filer.
Sur le flot du sourcelet, cours-y vite, cours-y vite,
sur le flot du sourcelet, cours-y vite. Il va filer.
De pommier en cerisier, cours-y vite, cours-y vite,
de pommier en cerisier, cours-y vite. Il va filer.
Saute par-dessus la haie, cours-y vite, cours-y vite,
saute par-dessus la haie, cours-y vite. Il a filé!
Paul Fort
Summertime
Éteins-moi les yeux
Éteins-moi les yeux : je saurai te voir,
bouche-moi les oreilles : je saurai t'entendre,
et même sans pieds saurai venir à toi,
et même sans bouche t'invoquer encore.
Brise-moi les bras, je te saisirai
avec mon cœur comme avec une main,
obstrue ce cœur, mon cerveau battra,
embrase ce cerveau,
mon sang te portera.
Rainer Maria Rilke
La poésie est le souffle
La poésie est le souffle et l'essence la plus pure de tout savoir ;
c'est l'expression passionnée qui anime le visage de toute science.
Ce que Shakespeare a dit de l'homme, on peut à plus forte raison
l'appliquer au poète : “il tourne son regard en avant et en arrière”.
William Wordsworth, Ballades lyriques