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Coups de cœur
L'espoir est la créature avec des ailes
L'espoir est la créature avec des ailes
Qui se perche dans l'âme
Et chante l'air sans les paroles
Et ne s'arrête jamais.
C'est la voix la plus douce dans la rafale ;
Affreux doit être l'orage
Qui pourrait déconcerter l'oiseau
Qui réchauffait tant de monde.
Je l'ai entendu au pays le plus froid
Et sur la mer la plus étrange ;
Pourtant jamais dans la détresse
Il ne m'a demandé une miette.
Emily Dickinson
Hope is the thing with feathers
That perches in the soul,
And sings the tune without the words,
And never stops at ail,
And sweetest in the gale is heard;
And sore must be the storm
That could abash the little bird
That kept so many warm.
I've heard it in the chillest land,
And on the strangest sea;
Yet, never, in extremity,
It asked a crumb of me.
--
Devant lui, souriante se tenait une jeune fille
Devant lui, souriante se tenait une jeune fille. Samba Diallo ne bougea pas, malgré l’invite, comme fasciné par l’apparition. Elle était grande et bien prise dans un jersey serré, dont la couleur noir rehaussait le teint chaud de soleil couchant du cou, du visage et des bras. Une masse pesante de cheveux noirs auréolait la tête et descendait en un pan lourd jusqu’aux épaules (…) Le cou était gracile sans être mince et sa sveltesse soulignait le poids d’une gorge ferme. Sur soleil rouge du visage éclatait le jais des yeux immenses, le reflet tour à tour retenu et offert du sourire timide. […] Il la suivit, et son regard s’attarda sur le lent ondoiement du buste qu’animait le rythme des jambes longues, et qu’il devinait fines, dans le prolongement des petits pieds chaussés de mocassins.
Cheikh Hamidou Kane, L’aventure ambiguë
Laisse les nuages
Laisse les nuages blancs passer au soleil.
Il n'y a ici que toi, la terre et le ciel.
Ne pense à presque rien.
Douces comme du miel.
Les ânes passeront en frissonnant de mouches.
La mère chantera sur l'enfant qu'elle couche,
Et je t'embrasserai, la bouche sur la bouche.
Puis le ciel sera bleu, puis le ciel sera gris.
Les oiseaux chanteront et pousseront des cris,
Et auprès du vieux puits il poussera des buis.
Ecoute mon amie : il y a sous la grange
Un nid d'hirondelles petites et criardes
Et qui ont la douceur de la vie calme et sage.
On a coupé les blés qui dormaient au soleil,
Puis la pluie est venue, elle est venue du ciel :
Elle a noyé le blé et a mangé le miel.
Mais la douleur est douce et ton amour est doux.
Tu m'as donné ton cœur, ta tête et tes genoux :
Nous ne faisons plus qu'un et ton cœur est à nous.
Francis Jammes
When I Am Laid In Earth
Cet obscur comme une étreinte
Cet obscur comme une étreinte,
Quelque chose qui semble toujours nous attendre quelque
Part et reste toujours caché ce cri étrange solitaire d’avant
Le monde comme d’un grand oiseau dans le gris du matin
Ce quelque part cet incertain qui est une solitude éternelle
Un manteau qui flotte autour du corps et dont on voudrait
Se défaire à chaque instant Toute rencontre est une énigme
Est un miroir qui nous défait et nous fait ressembler à cela
Ces mains enfouies dans la farine du soir quand l’heure est
Bleue quand il est temps d’écarter doucement les dentelles
De la nuit ou de l’aube ou de quelque début de toute rencontre
Nous prend la main dans le sac des yeux et nous transporte
Jusqu’à cet inconnu en nous cet obscur comme une étreinte
Qui se prépare mais nous ne savons pas ce qui nous lie à ça
Cet étonnement cette goutte d’ombre qui noue les cils de l’
Un à l’autre celle qui semble saoule et qu’on va reconnaître
Alain Duault
La poésie est une parole aimante
La poésie est une parole aimante : elle rassemble celui qui la prononce, elle le recueille dans la nudité de quelques mots. Ces mots – et avec eux le mystère de la présence humaine – sont offerts à celui qui les entend, qui les reçoit. La poésie, en ce sens, c’est la communication absolue d’une personne à une autre : un partage sans reste, un échange sans perte. On ne peut mentir en poésie. On ne peut dire que le vrai et seulement le vrai. Si on ment on sort de la poésie pour choir dans le langage coutumier, dans le mensonge habituel, dans la vie ordinaire, morte.
Christian Bobin
Pour vos beaux yeux
Pour vos beaux yeux et votre beau visage,
Et la douceur de ce divin langage
Dont vous tenez tout le monde enchanté,
Cloris, on doit souffrir votre fierté,
Et prés de vous avoir moins de courage.
Il est donc vrai, que je ne fus pas sage,
De ne pouvoir endurer un outrage,
Moi que l'Amour tient si bien arrêté
Pour vos beaux yeux.
A tout souffrir désormais je m'engage,
Et dans les fers d'un éternel servage,
Et les rigueurs de votre cruauté,
Je chanterai votre extrême beauté,
Et je ferais mille fois davantage
Pour vos beaux yeux.
Vincent Voiture
Blues in 'a'
Offrande
Au creux d'un coquillage
Que vienne l'heure claire
Je cueillerai la mer
Et je te l'offrirai.
Y dansera le ciel
Que vienne l'heure belle.
Y dansera le ciel
Et un vol d'hirondelle
Et un bout de nuage
Confondant les images
En l'aurore nouvelle
Dans un reflet moiré
Dans un peu de marée
Dans un rien de mirage
Au fond d'un coquillage.
Et te les offrirai.
Esther Granek