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Vertuchou.over-blog.com

Je serai nue

27 Janvier 2015, 04:01am

Publié par vertuchou

Je serai nue devant toi
Je ne regarderai rien autour
Je saurai dire ce qui vient
Sans bégayer.

Ce sera juste
et vrai
et lumineux.

Alors
Tu te lèveras
Tu partiras
sans me regarder
sans un mot
Tu soulèveras tes chaussures de papier
Je regarderai voler au-dessus de toi l’ombre de tes semelles
Tournoyantes
Rougeoyantes
Et rien
Jamais
ne pourra amonceler la lumière qui surgira.

Ce sera une flamme
Une lumière nue
Une ampoule
Seule
A un seul filament.

Je te regarderai partir
Et autour de nous
Les gens
N’oseront pas interrompre
Ta démarche lente et saccadée.

Les chiens tournoieront
Eux aussi
Sur eux-mêmes
Les ânes braieront
Les coqs suspendront leur cri
Même l’aube
Ne se lèvera pas de son lit
Tout sera silencieux
Sauf ma main qui te guettera
Dans le lointain
Je serai immobile
Calme et droite
Au milieu de nulle part
Un sourire arrivera
Sur mes lèvres fatiguées
Et tièdes
Et j’aurai envie à nouveau
de soulever le monde
De le faire briller
Pour des yeux immobiles
Qui ne regarderont pas
Les écailles argentées
Des poissons
Qui courent
Dans le fond de mon cœur.

Sabine Normand

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The Sidewinder

26 Janvier 2015, 03:58am

Publié par vertuchou

Lee Morgan - The Sidewinder (1963)

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Rêves

25 Janvier 2015, 03:55am

Publié par vertuchou

J'ai rêvé parfois que vos yeux
Me regardaient avec tristesse,
Que vos grands yeux bleus sérieux
Me regardaient avec tendresse ;

J'ai rêvé que vous écoutiez
Ces mots sur qui la voix hésite,
Et qui s'arrêtent effrayés
De l'aveu qui sous eux palpite ;

Que, dans mes mains, vos fines mains
Tombaient comme deux fleurs fauchées,
Et que nos pas, dans les chemins,
Laissaient leurs traces rapprochées.

Mais je n'ai pas osé rêver,
Dans les ivresses ni les fièvres,
Que ce bonheur pût m'arriver
Que ma bouche effleurât vos lèvres.

J'ai rêvé parfois que vos yeux
Me regardaient avec tendresse,
Que vos grands yeux bleus sérieux
Me regardaient avec tristesse.


Auguste Angellier

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L'eau à la bouche

24 Janvier 2015, 04:19am

Publié par vertuchou

Écoute ma voix écoute ma prière

Écoute mon cœur qui bat laisse-toi faire

Je t'en prie ne sois pas farouche

Quand me vient l'eau à la bouche

Je te veux confiante je te sens captive

Je te veux docile je te sens craintive

Je t'en prie ne sois pas farouche

Quand me vient l'eau à la bouche

Laisse toi au gré du courant

Porter dans le lit du torrent

Et dans le mien

Si tu veux bien

Quittons la rive

Partons à la dérive

Je te prendrai doucement et sans contrainte

De quoi as-tu peur allons n'aie nulle crainte

Je t'en prie ne sois pas farouche

Quand me vient l'eau à la bouche

Cette nuit près de moi tu viendras t'étendre

Oui je serai calme je saurai t'attendre

Et pour que tu ne t'effarouches

Vois je ne prend que ta bouche

Serge Gainsbourg

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Et si la poésie...

23 Janvier 2015, 04:18am

Publié par vertuchou

Et si la poésie n’était
Qu’une buanderie secrète
Aménagée dans un écart de langage
Où des mains rouges et veineuses
Rendraient à la parole
Son odeur de soleil
Sa roideur paysanne
Son monogramme millénaire ?

Jean Rousselot

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Composition IV

22 Janvier 2015, 04:10am

Publié par vertuchou

Vassily Kandinsky, Composition IV, huile sur toile, 1911, 159.5 x 250.5 cm

Vassily Kandinsky, Composition IV, huile sur toile, 1911, 159.5 x 250.5 cm

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Le flacon

21 Janvier 2015, 04:06am

Publié par vertuchou


Il est de forts parfums pour qui toute matière
Est poreuse. On dirait qu’ils pénètrent le verre.
En ouvrant un coffret venu de l’Orient
Dont la serrure grince et rechigne en criant,

Ou dans une maison déserte quelque armoire
Pleine de l’âcre odeur des temps, poudreuse et noire,
Parfois on trouve un vieux flacon qui se souvient,
D’où jaillit toute vive une âme qui revient.

Mille pensers dormaient, chrysalides funèbres,
Frémissant doucement dans les lourdes ténèbres,
Qui dégagent leur aile et prennent leur essor,
Teintés d’azur, glacés de rose, lamés d’or.

Voilà le souvenir enivrant qui voltige
Dans l’air troublé ; les yeux se ferment ; le Vertige
Saisit l’âme vaincue et la pousse à deux mains
Vers un gouffre obscurci de miasmes humains ;

Il la terrasse au bord d’un gouffre séculaire,
Où, Lazare odorant déchirant son suaire,
Se meut dans son réveil le cadavre spectral
D’un vieil amour ranci, charmant et sépulcral.

Ainsi, quand je serai perdu dans la mémoire
Des hommes, dans le coin d’une sinistre armoire
Quand on m’aura jeté, vieux flacon désolé,
Décrépit, poudreux, sale, abject, visqueux, fêlé,

Je serai ton cercueil, aimable pestilence !
Le témoin de ta force et de ta virulence,
Cher poison préparé par les anges ! Liqueur
Qui me ronge, ô la vie et la mort de mon cœur !

Charles Baudelaire

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Je te rencontre...

20 Janvier 2015, 04:01am

Publié par vertuchou

Cette ville était faite à la taille de l’amour. Tu étais fait à la taille de mon corps même.

Qui es-tu ? Tu me tues.

J’avais faim. Faim d’infidélités, d’adultères, de mensonges et de mourir.

Depuis toujours. Je me doutais bien qu’un jour tu me tomberais dessus.

Je t’attendais dans une impatience sans borne, calme.

Dévore-moi. Déforme-moi à ton image afin qu’aucun autre,

après toi, ne comprenne plus du tout le pourquoi de tant de désir.

Nous allons rester seuls, mon amour. La nuit ne va pas finir.

Le jour ne se lèvera plus sur personne. Jamais. Jamais plus.

Enfin. Tu me tues. Tu me fais du bien.


Marguerite Duras, Hiroshima mon amour

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Attends-moi

19 Janvier 2015, 04:15am

Publié par vertuchou

Si tu m'attends, je reviendrai,
Mais attends-moi très fort.
Attends, quand la pluie jaune
Apporte la tristesse,
Attends quand la neige tournoie,
Attends quand triomphe l'été
Attends quand le passé s'oublie
Et qu'on n' attend plus les autres.
Attends quand des pays lointains
Il ne viendra plus de courrier,
Attends, lorsque seront lassés
Ceux qui avec toi attendaient.
Si tu m'attends, je reviendrai.
Ne leur pardonne pas, à ceux
Qui vont trouver les mots pour dire
Qu'est venu le temps de l'oubli.
Et s'ils croient, mon fils et ma mère,
S'ils croient, que je ne suis plus,
Si les amis las de m'attendre
Viennent s'asseoir auprès du feu,
Et s'ils portent un toast funèbre
A la mémoire de mon âme...
Attends. Attends et avec eux
refuse de lever ton verre.
Si tu m'attends, je reviendrai
En dépit de toutes les morts.
Et qui ne m'a pas attendu
Peut bien dire : "C'est de la veine".
Ceux qui ne m'ont pas attendu
D'où le comprendraient-ils, comment
En plein milieu du feu,
Ton attente
M'a sauvé.
Comment j'ai survécu, seuls toi et moi
Nous le saurons,
C'est bien simple, tu auras su m'attendre, comme personne

Constantin Simonov

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Figures dans le château

18 Janvier 2015, 04:02am

Publié par vertuchou

Manuel Alvarez Bravo, Figures dans le château, 1920

Manuel Alvarez Bravo, Figures dans le château, 1920

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