Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Vertuchou.over-blog.com

A Ninon I

18 Avril 2013, 05:00am

Publié par vertuchou

Si je vous le disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
L'amour, vous le savez, cause une peine extrême;
C'est un mal sans pitiê que vous plaignez vous-même;
Peut-être cependant que vous m'en puniriez.

Si je vous le disais, que six mois de silence
Cachent de longs tourments et des voeux insensés:
Ninon, vous êtes fine, et votre insouciance
Se plaît, comme une fée, à deviner d'avance;
Vous me répondriez peut-être: Je le sais.

Si je vous le disais, qu'une douce folie
A fait de moi votre ombre, et m'attache à vos pas:
Un petit air de doute et de mélancolie,
Vous le savez, Ninon, vous rend bien plus jolie;
Peut-être diriez-vous que vous n'y croyez pas.

Si je vous le disais, que j'emporte dans l'âme
Jusques aux moindres mots de nos propos du soir:
Un regard offensé, vous le savez, madame,
Change deux yeux d'azur en deux éclairs de flamme;
Vous me défendriez peut-être de vous voir.

Si je vous le disais, que chaque nuit je veille,
Que chaque jour je pleure et je prie à genoux;
Ninon, quand vous riez, vous savez qu'une abeille
Prendrait pour une fleur votre bouche vermeille;
Si je vous le disais, peut-être en ririez-vous.

Mais vous n'en saurez rien. Je viens, sans rien en dire,
M'asseoir sous votre lampe et causer avec vous;
Votre voix, je l'entends; votre air, je le respire;
Et vous pouvez douter, deviner et sourire,
Vos yeux ne verront pas de quoi m'être moins doux.

Je récolte en secret des fleurs mystérieuses:
Le soir, derrière vous, j'écoute au piano
Chanter sur le clavier vos mains harmonieuses,
Et, dans les tourbillons de nos valses joyeuses,
Je vous sens, dans mes bras, plier comme un roseau.

La nuit, quand de si loin le monde nous sépare,
Quand je rentre chez moi pour tirer mes verrous,
De mille souvenirs en jaloux je m'empare;
Et là, seul devant Dieu, plein d'une joie avare,
J'ouvre, comme un trésor, mon coeur tout plein de vous.

J'aime, et je sais répondre avec indifférence;
J'aime, et rien ne le dit; j'aime, et seul je le sais;
Et mon secret m'est cher, et chère ma souffrance;
Et j'ai fait le serment d'aimer sans espérance,
Mais non pas sans bonheur; je vous vois, c'est assez.

Non, je n'étais pas né pour ce bonheur suprême,
De mourir dans vos bras et de vivre à vos pieds.
Tout me le prouve, hélas ! jusqu'à ma douleur même...
Si je vous le disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?


Alfred de Musset

Voir les commentaires

Concerto pour quatre pianos

17 Avril 2013, 05:54am

Publié par vertuchou

 

 

 

 

Johann Sebastian Bach

Concerto pour  quatre pianos

en la mineur BWV 1065

 

Michael Dalberto, 1er piano;

Anne Queffelec, 2ème piano;

Pascal Devoyon, 3ème piano;

Jacques Gauthier, 4ème piano.

 

Orchestre De Chambre

dirigé par  Jean -Francois Paillard.

Voir les commentaires

La gare

16 Avril 2013, 05:17am

Publié par vertuchou

Ma non-arrivée dans la ville N
s'est passée à l'heure ponctuelle

Je te l’avais annoncé
par une lettre non envoyée.

Tu as eu tout le temps
de ne pas arriver à l'heure

Le train est arrivé quai trois
un flot de gens est descendu.

 

La foule en sortant emporta
l’absence de ma personne

Quelques femmes s’empressèrent
de prendre ma place dans la foule

Quelqu'un que je ne connaissais pas
courut vers une d'entre elles
qui la reconnut immédiatement.

Ils échangèrent un baiser
qui n’était pas pour nos lèvres.
Entre temps une valise disparut
qui n'était pas la mienne

La gare de la ville N a passé
son examen d’existence objective

Tout était parfaitement en place
et chaque détail avancait
sur des rails infiniment bien tracés.

Même le rendez-vous a eu lieu.

Mais sans notre présence.

Au paradis perdu
de la probabilité

Ailleurs
ailleurs.
Combien résonnent ces mots.

 

Wislawa Szymborska

Voir les commentaires

L’ogre enjoué

15 Avril 2013, 05:39am

Publié par vertuchou

JOAN-MIRO-1893-1983--L-ogre-enjoue--1969-.jpg

 

JOAN MIRÓ 1893-1983

L’ogre enjoué

1969

,

Voir les commentaires

Un jour disparu

14 Avril 2013, 05:44am

Publié par vertuchou

Un jour disparu
Un temps disparu
S’éveille encore en ma mémoire.
Luttes variées d’ombres et de rayons de soleil
Au-dessus de la ligne des sentiers de forêt
Parfum d’été,
Vents jouant.

 

Jens Peter Jacobsen

Voir les commentaires

La nuit me parle de toi

13 Avril 2013, 05:13am

Publié par vertuchou

La nuit me parle de toi
elle ne me donne pas de rêves
pleins de femmes transparentes
mais elle m'apporte ton image
afin que ton absence
ne m'étrangle pas tout à fait.

 Elle voit avec scandale
que je n'ai pas ton corps dans mes bras
et elle allonge près de moi
le fantôme de ta peau.

 Elle me dit
qu'à force de t'aimer tu m'aimeras
et qu'ainsi cessera ma longue insomnie
sur ta présence réelle
et sur ton vrai sang.

Il le faut

Il  le faut
il le faudra un jour

Nous saurons inventer
Tout sera pur comme l'hiver

Personne n'aura su avant nous.
Nos craintes seront plus douces qu'une ombre blanche.

Ce sera comme si nous avions invité
d'invisibles colombes
à voler avec nous.

Ce sera comme si nous habitions le feu de leurs ailes
avant de ne plus savoir
qui nous sommes l'un de l'autre.

Alain Borne

 

Voir les commentaires

Erat autem Barabbas latro

12 Avril 2013, 04:14am

Publié par vertuchou

Voir les commentaires

La poésie est la tendresse

11 Avril 2013, 05:42am

Publié par vertuchou

La poésie est la tendresse espiègle des jeux de mots.


Michel Boutho

Voir les commentaires

Ne m'aimez pas

10 Avril 2013, 05:06am

Publié par vertuchou

Ne m'aimez pas !... Je veux pouvoir prier pour vous,
Comme pour les amis dont le soir, à genoux,
Je me souviens — afin qu'éloignant la tempête,
Dieu leur donne un ciel pur pour abriter leur tête.

Je veux, de vos bonheurs, prendre tout haut ma part,
Le front calme et serein, sans craindre aucun regard ;
Je veux, quand vous entrez, vous donner un sourire,
Trouver doux de vous voir, en osant vous le dire.

Je veux, si vous souffrez, partageant vos destins,
Vous dire : « Qu'avez-vous ? » et vous tendre les mains.
Je veux, si par hasard votre raison chancelle,
Vous réserver l'appui de l'amitié fidèle,
Et qu'entraîné par moi dans le sentier du bien,
Votre pas soit guidé par la trace du mien.

Je veux, si je me blesse aux buissons de la route,
Vous chercher du regard, et sans crainte, sans doute,
Murmurer à voix basse : « Ami, protégez-moi ! »
Et prenant votre bras, m'y pencher sans effroi.

Je veux qu'en nos vieux jours, au déclin de la vie,
Nous détournant pour voir la route... alors finie,
Nos yeux, en parcourant le long sillon tracé,
Ne trouvent nul remords dans les champs du passé.

Laissez les sentiments qu'on brise ou qu'on oublie ;
Gardons notre amitié, que ce soit pour la vie !
Votre sœur, chaque jour, vous suivra pas à pas...
Oh ! je vous en conjure, ami, ne m'aimez pas !

Sophie d'Arbouville.

Voir les commentaires

Éloge du lointain

9 Avril 2013, 05:11am

Publié par vertuchou

 

Dans la source de tes yeux
vivent les nasses des pêcheurs de la mer délirante.
Dans la source de tes yeux
la mer tient sa parole.

J’y jette,
cœur qui a séjourné chez des humains,
les vêtements que je portais et l’éclat d’un serment:

Plus noir au fond du noir, je suis plus nu.
Je ne suis, qu’une fois renégat, fidèle.
Je suis toi, quand je suis moi.

Dans la source de tes yeux
je dérive et rêve de pillage.

Une nasse a capturé dans ses mailles une nasse:
nous nous séparons enlacés.

Dans la source de tes yeux
un pendu étrangle la corde.

 

Paul Célan

Voir les commentaires