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Vertuchou.over-blog.com

Ode à l'aimée

4 Décembre 2014, 04:27am

Publié par vertuchou

Heureux ! qui près de toi, pour toi seule soupire,
Qui jouit du plaisir de t'entendre parler,
Qui le voit quelquefois doucement lui sourire.
Les dieux dans son bonheur peuvent-ils l'égaler ?

Je sens de veine en veine une subtile flamme
Courir par tout mon corps sitôt que je te vois
Et dans les doux transports où s'égare mon âme,
Je ne saurais trouver de langue, ni de voix.

Un nuage confus se répand sur ma vue.
Je n'entends plus: je tombe en de douces langueurs;
Et, pâle, sans haleine, interdite, éperdue,
Un frisson me saisit, je tremble, je me meurs.

Sappho

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C'est ça la poésie

3 Décembre 2014, 04:18am

Publié par vertuchou

[...] La société vue d'un certain point de vue que je connais, est une fourmilière

où tout est instinct, même et surtout l'intelligence, où les actions ne s'enchaînent

que pour faire une espèce d'usine absurde. De cette société il faut essayer

de sortir et c'est le but de la poésie. Sortir de là. Passer comme en se jouant

devant les gardes de la porte. Certes on ne leur échappe jamais entièrement

– mais on déborde sur le monde, dans le vide. C'est ça la poésie.

Pierre Garnier

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Chant funèbre / Funeral Blues

2 Décembre 2014, 04:04am

Publié par vertuchou

Arrêtez les pendules, coupez le téléphone,
Faites taire le chien d’un os gras qu’on lui donne,
Silence les pianos ! Sourdine, les tambours
Pour sortir le cercueil entre tout ces cœurs lourds..

Que les aéroplanes voltigeant au dehors
dessinent ces trois mot : Il Est Mort.
Mettez du crêpe noir aux cous blancs des pigeons,
aux mains des policiers des gants noirs en coton.

Il était mon Nord, mon Sud, mon Est, mon Ouest,
ma semaine affairée, mon dimanche de sieste,
mon midi, mon minuit, mes mots et ma chanson.
Je pensais que l'amour ne finirait jamais : eh bien non.

Plus besoin des étoiles et que, tous, ils s’en aillent
envelopper la lune, démonter le soleil
assécher l'océan, arracher les forêts
car ici rien d’heureux n’adviendra plus jamais.

--------------------

Stop all the clocks, cut off the telephone,
Prevent the dog from barking with a juicy bone,
Silence the pianos and with muffled drum
Bring out the coffin, let the mourners come.


Let aeroplanes circle moaning overhead
Scribbling on the sky the message He Is Dead,
Put crepe bows round the white necks of the public doves,
Let the traffic policemen wear black cotton gloves.


He was my North, my South, my East and West,
My working week and my Sunday rest,
My noon, my midnight, my talk, my song;
I thought that love would last for ever: I was wrong.


The stars are not wanted now: put out every one;
Pack up the moon and dismantle the sun;
Pour away the ocean and sweep up the wood.
For nothing now can ever come to any good.

Wystan Hugh Auden

traduction Yves Perret

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le cerf blessé

1 Décembre 2014, 04:04am

Publié par vertuchou

Corrido pour A. et L.

Mai 1946

Tout seul allait le petit Cerf
triste, à l’abandon, blessé
mais chez Arcady et Lina
il put enfin se réfugier

Quand le Cerf s’en reviendra
requinqué, joyeux, soulagé,
les blessures de son corps meurtri
enfin auront été gommées

Merci, mes enfants bien-aimés,
de tout cœur, pour votre appui
Dans la forêt qu’habite le Cerf
enfin le ciel s’est éclairci

Coyoacan, vendredi 3 mai 1946

Acceptez ci-joint mon portrait
pour que toujours je sois présente,
tous les jours et toutes les nuits,
même quand je serai absente.

La tristesse est reflétée
dans chaque recoin de mes tableaux,
je ne vois pas la moindre issue
car c’est bel et bien mon lot.

Inversement, le bonheur
est dedans mon cœur enfoui
grâce à Arcady et Lina
parce qu’ils m’aiment telle que je suis.

Je vous offre cette peinture
réalisée avec tendresse
en échange de votre amour
et de votre gentillesse.

Frida

Frida Kahlo, le cerf blessé, huile sur masonite,1946,

Frida Kahlo, le cerf blessé, huile sur masonite,1946,

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matin d'octobre

30 Novembre 2014, 04:14am

Publié par vertuchou

C'est l'heure exquise et matinale
Que rougit un soleil soudain.
A travers la brume automnale
Tombent les feuilles du jardin.

Leur chute est lente. Ou peut les suivre
Du regard en reconnaissant
Le chêne à sa feuille de cuivre,
L'érable à sa feuille de sang.

Les dernières, les plus rouillées,
Tombent des branches dépouillées :
Mais ce n'est pas l'hiver encor.

Une blonde lumière arrose
La nature, et, dans l'air tout rose,
On croirait qu'il neige de l'or.

François Coppée

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Ce serait d’abord un long, un très long baiser

29 Novembre 2014, 04:11am

Publié par vertuchou

Ce serait d’abord
Un long, un très long baiser
Une rivière affolée
Grossie par une pluie soudaine
Des courants
Retenus depuis si longtemps
Qui se mêlent
Un lent, très lent effeuillage
Où les lèvres picorent
La peau qui se dénude

La suite
Je crois la connaître
Elle n’est jamais la même
Car je t’aime.

Brigitte Delsalle

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Le silence est un message de l’ombre

28 Novembre 2014, 04:00am

Publié par vertuchou

le silence est un message de l’ombre
qui ne franchit aucun seuil et se nourrit
de la lumière et de son absence

le silence est un signe quand la parole
fait erreur ou reste inachevée

le silence est un jardin du ciel
qui adresse au ciel une prière muette
en forme de paysage

le silence est une question
posée à la question

le silence est la maison où habite le poème
où il prend corps
tout en se condamnant au silence

le silence est une musique dont les notes
sont les planètes et leurs étoiles

le silence est une saison où mûrit le fruit
d’un poème sans mots

le silence est une vibration de l’immobile
un chant à naître dans la gorge
d’oiseaux en forme de voyelles

le silence est une errance
qui indique discrètement le chemin
au milieu du chemin

le silence est la main qui ouvre le poème
la voix tremblée de l’âme d’où surgit
ce que nous sommes et ne sommes pas

le silence est le rêve de l’être qui rêve
sa naissance d’avant sa naissance
et tait son premier cri

le silence est le miroir qui lave la parole
dans l’eau la plus nue de la parole

le silence est un miracle inachevé
où le monde prend forme d’un seul coup

Amina Saïd

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Lachrimae Caravaggio

27 Novembre 2014, 04:49am

Publié par vertuchou

Lachrimae Caravaggio, l'Europe musicale au temps du Caravage, Hesperion XXI sous la direction de Jordi Savall

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Dédicace / Widmung

26 Novembre 2014, 04:44am

Publié par vertuchou

Je ne vous écris pas de lettres,
mais il me serait facile de mourir avec vous.
Doucement, nous nous laisserions glisser
le long des lunes, une première halte
auprès des cœurs de laine, puis
une autre parmi les loups, les framboisiers
et ce feu que rien n'apaise ; à la troisième,
j'aurais traversé les fines mousses
des nuages raréfiés,
passé sans effort le pauvre fourmillement
des étoiles, pour arriver
dans votre ciel, tout près de vous.

----

Ich schreibe euch keine Briefe,
aber es wäre mir leicht, mit euch zu sterben.
Wir liessen uns sacht die Monde hinunter
und läge die erste Rast noch
bei den wollenen Herzen, die zweite
fände uns schon mit Wölfen und Himbeergrün

und dem nichts lindernden Feuer, die dritte,
da wär ich durch das fallende dünne Gewölk
mit seinen spärlichen Moosen
und das arme Gewimmel der Sterne,
das wir so leicht überrschritten,
in eurem Himmel bei euch.

Ilse Aichinger

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Parfum éxotique

25 Novembre 2014, 04:38am

Publié par vertuchou

Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne,
Je respire l'odeur de ton sein chaleureux,
Je vois se dérouler des rivages heureux
Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone ;

Une île paresseuse où la nature donne
Des arbres singuliers et des fruits savoureux ;
Des hommes dont le corps est mince et vigoureux,
Et des femmes dont l'œil par sa franchise étonne.

Guidé par ton odeur vers de charmants climats,
Je vois un port rempli de voiles et de mâts
Encor tout fatigués par la vague marine,

Pendant que le parfum des verts tamariniers,
Qui circule dans l'air et m'enfle la narine,
Se mêle dans mon âme au chant des mariniers.

Charles Baudelaire

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