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La poésie mène au même point

23 Août 2014, 04:09am

Publié par vertuchou

La poésie mène au même point que chaque forme de l’érotisme, à l’indistinction, à la confusion des objets distincts. Elle nous mène à l’éternité, elle nous mène à la mort, à la continuité : la poésie est l’éternité. C’est la mer allée avec le soleil.

Georges Bataille

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Cicatrice

22 Août 2014, 04:26am

Publié par vertuchou

Un pétale, une fleur, une tige
est coupée
Une goutte d’un bout
à l’autre se brise
Comme l’appel d’un feu
qui ne s’éteint jamais
Comme le son d’un regard
aux lignes élastiques
Une géométrie variable
un océan de paix
qui cicatrise
qui traverse la vague au détour des récifs
et tout explose et ils me disent :
“Reviens !”


Winston Perez,

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Soul Eyes

21 Août 2014, 04:07am

Publié par vertuchou

Stan Getz, Soul Eyes

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Puisque j'ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine

20 Août 2014, 04:05am

Publié par vertuchou

Puisque j'ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine,
Puisque j'ai dans tes mains posé mon front pâli,
Puisque j'ai respiré parfois la douce haleine
De ton âme, parfum dans l'ombre enseveli,

Puisqu'il me fut donné de t'entendre me dire
Les mots où se répand le cœur mystérieux,
Puisque j'ai vu pleurer, puisque j'ai vu sourire
Ta bouche sur ma bouche et tes yeux sur mes yeux ;

Puisque j'ai vu briller sur ma tête ravie
Un rayon de ton astre, hélas ! voilé toujours,
Puisque j'ai vu tomber dans l'onde de ma vie
Une feuille de rose arrachée à tes jours,

Je puis maintenant dire aux rapides années :
Passez ! passez toujours ! je n'ai plus à vieillir !
Allez-vous-en avec vos fleurs toutes fanées ;
J'ai dans l'âme une fleur que nul ne peut cueillir !

Votre aile en le heurtant ne fera rien répandre
Du vase où je m'abreuve et que j'ai bien rempli.
Mon âme a plus de feu que vous n'avez de cendre !
Mon cœur a plus d'amour que vous n'avez d'oubli !

Victor Hugo

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Invitez-moi à passer la nuit

19 Août 2014, 04:02am

Publié par vertuchou

Invitez-moi à passer la nuit dans votre bouche
Racontez-moi la jeunesse des rivières
Pressez ma langue contre votre œil de verre
Donnez-moi votre jambe comme nourrice
Et puis dormons frère de mon frère
Car nos baisers meurent plus vite que la nuit.

Joyce Mansour

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À peine défigurée

18 Août 2014, 04:53am

Publié par vertuchou

Adieu tristesse
Bonjour tristesse
Tu es inscrite dans les lignes du plafond
Tu es inscrite dans les yeux que j'aime
Tu n'es pas tout à fait la misère
Car les lèvres les plus pauvres te dénoncent
Par un sourire
Bonjour tristesse
Amour des corps aimables
Puissance de l'amour dont l'amabilité surgit
Comme un monstre sans corps
Tête désappointée
Tristesse beau visage.

Paul Eluard

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Big Sur Evening

17 Août 2014, 04:59am

Publié par vertuchou

 Simon Bull, Big Sur Evening

Simon Bull, Big Sur Evening

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Tu n’es pas du tout vertueuse

16 Août 2014, 04:19am

Publié par vertuchou

Tu n’es pas du tout vertueuse,

Je ne suis pas du tout jaloux :
C’est de se la couler heureuse
Encor le moyen le plus doux.

Vive l’amour et vivent nous !

Tu possèdes et tu pratiques
Les tours les plus intelligents
Et les trucs les plus authentiques
À l’usage des braves gens

Et tu m’as quels soins indulgents !

D’aucuns clabaudent sur ton âge
Qui n’est plus seize ans ni vingt ans,
Mais ô ton opulent corsage,
Tes yeux riants, comme chantants,

Et ô tes baisers épatants !

Sois-moi fidèle si possible
Et surtout si cela te plaît,
Mais reste souvent accessible
À mon désir, humble valet

Content d’un " viens ! " ou d’un soufflet.

" Hein ? passé le temps des prouesses !
Me disent les sots d’alentour.
Ca, non, car grâce à tes caresses
C’est encor, c’est toujours mon tour.

Vivent nous et vive l’amour !


Paul Verlaine

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En poésie, on n’habite que le lieu

15 Août 2014, 04:21am

Publié par vertuchou

En poésie, on n’habite que le lieu que l’on quitte, on ne crée que l’œuvre dont on se détache, on n’obtient la durée qu’en détruisant le temps.
— René Char

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Position du poème

14 Août 2014, 04:46am

Publié par vertuchou

il est assis
il a les genoux pliés
il voit le monde
il voit des fleurs de trèfle blanches
il voit un toit de tuiles rouges
il voit un carré de ciel gris
il ne voit pas le monde
il est le monde à lui tout seul
il peut changer de place
il peut se lever
il pourrait s’éloigner de sa table
il irait dans la cuisine
parmi les couteaux métalliques
parmi les fourchettes acérées
parmi les casseroles bouillantes
il se couperait une tranche de monde
il mordrait dans le monde à belles dents
ici il voit le monde avec les doigts
il compte le monde sur un clavier
il écrit une partition
la partition s’appelle le monde
c’est une partition en sol mineur
en ciel majeur en tuiles diésées
en trèfle blanc
en genoux pliés
les touches du clavier sont noires
ne touchez pas aux touches s’il vous plaît
le poème est assis
le poème est en train de s’écrire
il est interdit de parler au poème
do not disturb
non ce n’est pas de l’anglais
le poème est écrit en français
le clavier est fabriqué en Allemagne
made in germany
c’est un clavier adler
mais le poème est français
cela se reconnaît
à la façon dont le poème est assis
le poème n’est pas assis sur le monde
le poème est assis dans son fauteuil
on voit le fauteuil
on voit un coin de monde
mais on voit aussi le fauteuil
on voit surtout le fauteuil
c’est un « cadot » picard
c’est un « cadot » traditionnel en paille tressée
c’est un « cadot » paysan
il n’y a plus de paysan
ceux qui restent préfèrent le formica
les statistiques sont formelles
les paysans d’aujourd’hui préfèrent le formica
une statistique n’est pas un poème
le poème est une fausse statistique
les statistiques sont une salle d’attente
les statistiques attendent qu’on les appelle
si personne ne les appelait les statistiques ne bougeraient pas
les statistiques ont besoin d’un docteur
attention le poème va se lever
les statistiques se soignent
attention le poème se lève
ne restez pas dans ses jambes
le poème est sorti
le poème laisse son fauteuil vide
à la place du poème on voit ce qu’il voyait
on voit des fleurs de trèfle blanches
on voit un toit de tuiles rouges
on voit un carré de ciel gris
on voit le monde
tout à coup on voit passer le poème
on le voit passer de sa place
de la place où il s’assied
il ne nous voit pas
il ne voit pas qu’on est assis à sa place
il ne voit pas qu’on le voit
le poème est dehors
le poème est derrière la vitre
on ne sait pas ce qu’il voit
on le saura à son retour
le poème revient
le poème ne s’éloigne pas
on ne connaît pas de poème qui soit jamais parti
définitivement
pour toujours
cela ferait un vide
le poème est domestique
le poème est sauvagement domestique
il ne tient pas en place
il tourne sur place
il tourne sur lui-même
attention le poème va rentrer
le poème rentre
il a l’air d’un poème qui a pris l’air
il est inspiré
il plie les genoux
il se carre dans son cadot
la paille crisse
il pose les doigts sur le clavier
on entend la musique des touches
c’est un ravissement
je ne connais rien de plus beau que la musique des touches
écoutez

Jacques Darras

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