La poésie est ce rien
La poésie est ce rien – mais un rien qui annule le reste – qui
nous engage "entièrement" sur cette scène vide;
André du Bouchet
Coups de cœur
La poésie est ce rien – mais un rien qui annule le reste – qui
nous engage "entièrement" sur cette scène vide;
André du Bouchet
Domenico Scarlatti, sonate K132 en do majeur, Andante
In Flanders fields the poppies blow
Between the crosses row on row,
That mark our place; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.
We are the Dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved and were loved and now we lie
In Flanders fields.
Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.
John McCrae – 1915
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Dans les champs de Flandre, les coquelicots ondulent
Entre les croix rang après rang
Qui marquent notre place et dans le ciel
Les alouettes bravement chantent encore et volent
À peine audibles dans le bruit des canons
Nous sommes les morts.
Il y a quelques jours, nous vivions encore
Nous sentions la douceur de l'aube
Nous regardions l'embrasement du soleil couchant
Nous aimions et nous étions aimés
Maintenant, nos corps sont étendus
Dans les champs de Flandres
Poursuivez votre combat avec l'adversaire
Nous vous lançons le flambeau de nos mains défaillantes
Afin qu'il soit vôtre et que vous le teniez haut
Si vous manquez de parole à nous qui mourons
Nous ne pourrons pas dormir bien que les coquelicots poussent
Dans les champs de Flandres.
Même s'il me faut lâcher ta main
Sans pouvoir te dire "à demain"
Rien ne défera jamais nos liens
Même s'il me faut aller plus loin
Couper les ponts, changer de train
L'amour est plus fort que le chagrin
L'amour qui fait battre nos cœurs
Va sublimer cette douleur
Transformer le plomb en or
Tu as tant de belles choses à vivre encore
Tu verras au bout du tunnel
Se dessiner un arc-en-ciel
Et refleurir les lilas
Tu as tant de belles choses devant toi
Même si je veille d'une autre rive
Quoi que tu fasses, quoi qu'il t'arrive
Je serai avec toi comme autrefois
Même si tu pars à la dérive
L'état de grâce, les forces vives
Reviendront plus vite que tu ne crois
Dans l'espace qui lie le ciel et la terre
Se cache le plus grand des mystères
Comme la brume voilant l'aurore
Il y a tant de belles choses que tu ignores
La foi qui abat les montagnes
La source blanche dans ton âme
Penses-y quand tu t'endors
L'amour est plus fort que la mort
Dans le temps qui lie ciel et terre
Se cache le plus beau des mystères
Penses-y quand tu t'endors
L'amour est plus fort que la mort
Françoise Hardy
Vous pouvez me rabaisser pour l’histoire
Avec vos mensonges amers et tordus,
Vous pouvez me traîner dans la boue
Mais comme la poussière, je m’élève pourtant,
Mon insolence vous met-elle en colère?
Pourquoi vous drapez-vous de tristesse
De me voir marcher comme si j’avais des puits
De pétrole pompant dans ma salle à manger?
Comme de simples lunes et de simples soleils,
Avec la certitude des marées
Comme de simples espoirs jaillissants,
Je m’élève pourtant.
Voulez-vous me voir brisée?
La tête et les yeux baissés?
Les épaules tombantes comme des larmes.
Affaiblie par mes pleurs émouvants.
Es-ce mon dédain qui vous blesse?
Ne prenez-vous pas affreusement mal
De me voir rire comme si j’avais des mines
d’or creusant dans mon potager?
Vous pouvez m’abattre de vos paroles,
Me découper avec vos yeux,
Me tuer de toute votre haine,
Mais comme l’air, je m’élève pourtant.
Ma sensualité vous met-elle en colère?
Cela vous surprend-il vraiment
De me voir danser comme si j’avais des
Diamants, à la jointure de mes cuisses?
Hors des cabanes honteuses de l’histoire
Je m’élève
Surgissant d’un passé enraciné de douleur
Je m’élève
Je suis un océan noir, bondissant et large,
Jaillissant et gonflant je tiens dans la marée.
En laissant derrière moi des nuits de terreur et de peur
Je m’élève
Vers une aube merveilleusement claire
Je m’élève
Emportant les présents que mes ancêtres m’ont donnés,
Je suis le rêve et l’espérance de l’esclave.
Je m’élève
Je m’élève
Je m’élève
Maya Angelou
Ce qu'il me faut à moi, c’est la brutale orgie,
La brune courtisane à la lèvre rougie
Qui se pâme et se tord ;
Qui s’élance à vos bras dans sa fougueuse ivresse,
Qui laisse ses cheveux se dérouler en tresse,
Vous étreint et vous mord !
C ‘est une femme ardente autant qu’une Espagnole.
Dont les transports d'amour rendent la tête folle
Et font craquer le lit;
c'est une passion forte comme la lèvre,
Une lèvre de feu qui s. attache à ma lèvre
pendant toute une nuit !
C'est une cuisse blanche à la mienne enlacée,
Une lèvre de feu d'où jaillit la pensée;
Ce sont surtout deux seins,
Fruits d'amour arrondis par une main divine,
Qui tous deux à la fois vibrent sur la poitrine,
Qu'on prend à pleines mains.
Eh bien! venez encor me vanter vos pucelles,
Avec leurs regards froids, avec leurs tailles frêles,
Frêles comme un roseau ;
Qui n'osent d’un seul doigt vous toucher, — ni rien dire,
Qui n'osent regarder et craignent de sourire,
Ne boivent que de l’eau.
Non! Vous ne valez pas, ô tendre jeune fille,
Au teint frais et si pur caché sous la mantille,
Et dans le blanc satin,
Non. Dames de grand ton, en tout, tant que vous êtes,
Non, vous ne valez pas, femmes dites honnêtes,
Un amour de catin !
Alfred Musset
La poésie est une salve contre l'habitude.
Henri Pichette, Apoèmes
L'intelligence dit la fourmi travaille.
L'amour dit qu'elle souffre.
L'intelligence dit que la fleur est éclose.
L'amour dit qu'elle est belle et va mourir.
L'intelligence dit que la pierre est muette.
L'amour dit qu'elle a peur de parler.
L'intelligence dit que l'astre en cache d' autres.
L'amour dit qu'il est seul dans sa gloire infinie.
L'intelligence dit que la rivière coule.
L'amour dit qu'elle passe et que c'est triste.
L'intelligence dit qu'elle est lumière.
L'amour dit qu'il accepte d'être aveugle.
L'intelligence dit que le jour suit la nuit
L'amour dit que le jour et la nuit se confondent.
L'intelligence dit qu'il faut comprendre.
L'amour dit qu'on a tort de trop s'interroger,
L'intelligence dit que l'oiseau vole.
L'amour dit que l'oiseau est un dieu.
L'intelligence dit que l'amour le dérange.
L'amour dit qu'il envie l'intelligence.
Alain Bosquet