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Vertuchou.over-blog.com

Cette émotion appelée poésie

25 Septembre 2016, 03:15am

Publié par vertuchou

La poésie n’est en rien ni nulle part, c’est pourquoi
elle peut être mise en tout et partout. Mais rien ne s’opère
sans une véritable transmutation des valeurs.
Dans l’impuissance à la saisir, à l’identifier où que ce soit,
on a préféré déclarer qu’elle régnait partout
et qu’il suffisait de savoir l’y découvrir.

Or, il est parfaitement évident qu’elle est plutôt une absence,
un manque au cœur de l’homme, et, plus précisément,
dans le rapport que le poète a le don de mettre à la place
de cette absence, de ce manque.
Et il n’y a poésie réelle que là ou a été comblé ce vide
qui ne pouvait absolument l’être par aucune autre
activité ou matière réelle de la vie.

Pierre Reverdy

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24 septembre 1945

24 Septembre 2016, 04:23am

Publié par vertuchou

Le plus beau des océans
est celui que l’on n’a pas encore traversé.
Le plus beau des enfants
n’a pas encore grandi.
Les plus beaux de nos jours
sont ceux que nous n’avons pas encore vécus.
Et les plus beaux des poèmes que je veux te dire
sont ceux que je ne t’ai pas encore dits.

Que c’est beau de penser à toi :
à travers les rumeurs de morts et de victoire
en prison
alors que j’ai passé la quarantaine…

Que c’est beau de penser à toi :
ta main oubliée sur un tissu bleu
et dans tes cheveux
la fière douceur de ma terre bien-aimée d’Istanbul…
C’est comme un second être en moi
que le bonheur de t’aimer…
le parfum de la feuille de géranium au bout de mes doigts,
une quiétude ensoleillée
et l’invite de la chair :
striée d’écarlate
l’obscurité
chaude
dense…

Nâzim Hikmet

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Portrait de Paulette Goddard

23 Septembre 2016, 03:09am

Publié par vertuchou

George Hurrell, Portrait de Paulette Goddard

George Hurrell, Portrait de Paulette Goddard

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L'odeur des jacynthes.

22 Septembre 2016, 03:08am

Publié par vertuchou

Les cœurs dorment dans des coffrets
Que ferment de belles serrures ;
Sous les émaux et les dorures
La poussière des vieux secrets
Et des lointaines impostures
Se mêle aux frêles moisissures
Des plus récentes aventures :
Chère, ôtez vos doigts indiscrets,
Les cœurs dorment.

Vos doigts ravivent des blessures
Et vos regards sont des injures,
Laissez-les reposer en paix.
Comme des rois dans leurs palais
Ou des morts dans leurs sépultures,
Les cœurs dorment.

Rémy de Gourmont

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Le premier jour de notre rencontre

21 Septembre 2016, 03:05am

Publié par vertuchou

Le premier jour de notre rencontre, je trouvais dans votre visage certains traits, certains passages moins doux, peut-être. Maintenant ce sont ceux-là que je préfère ; je ne les regarde jamais sans une tendresse immense, sans une grande envie de vous parler plus amicalement encore.
Il y a des gestes, des phrases, des mouvements de fonds que j’ai recueillis précieusement, sans que vous le sachiez : je me rappelle, le premier jour, votre façon de me regarder en face tout d’un coup — comme on regarde quelqu’un qui ment. Je me rappellerai toujours le son de votre voix, si simple, si grave et si drôle. […] Je n’oublierai jamais cette émotion qui m’a bouleversé, le soir du premier vendredi, lorsque, sentant mes coudes écorchés, j’ai compris tout à coup : « c’est que, plusieurs heures, je suis resté accoudé, penché sur elle ». […] Je me rappellerai encore bien d’autres choses plus belles, comme ces grands frissons qui vous traversent et vous font tant de mal et qui sont beaux pourtant. C’est ainsi que vous me faites mal et que je vous aime pourtant.

— Lettre d’Alain Fournier à Jeanne, 1910

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Je suis comme je suis

20 Septembre 2016, 03:03am

Publié par vertuchou

Je suis comme je suis
Je suis faite comme ça
Quand j'ai envie de rire
Oui je ris aux éclats
J'aime celui qui m'aime
Est-ce ma faute à moi
Si ce n'est pas le même
Que j'aime chaque fois
Je suis comme je suis
Je suis faite comme ça
Que voulez-vous de plus
Que voulez-vous de moi


Je suis faite pour plaire
Et n'y puis rien changer
Mes talons sont trop hauts
Ma taille trop cambrée
Mes seins beaucoup trop durs
Et mes yeux trop cernés
Et puis après
Qu'est-ce que ça peut vous faire
Je suis comme je suis
Je plais à qui je plais


Qu'est-ce que ça peut vous faire
Ce qui m'est arrivé
Oui j'ai aimé quelqu'un
Oui quelqu'un m'a aimée
Comme les enfants qui s'aiment
Simplement savent aimer
Aimer aimer...
Pourquoi me questionner
Je suis là pour vous plaire
Et n'y puis rien changer.

Jacques Prévert

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Beautiful Life

19 Septembre 2016, 02:59am

Publié par vertuchou

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Je ne veux point fouiller au sein de la nature,

18 Septembre 2016, 02:58am

Publié par vertuchou

Je ne veux point fouiller au sein de la nature,
Je ne veux point chercher l’esprit de l’univers,
Je ne veux point sonder les abîmes couverts,
Ni dessiner du ciel la belle architecture.

Je ne peins mes tableaux de si riche peinture,
Et si hauts arguments ne recherche à mes vers :
Mais suivant de ce lieu les accidents divers,
Soit de bien, soit de mal, j’écris à l’aventure.

Je me plains à mes vers, si j’ai quelque regret :
Je me ris avec eux, je leur dis mon secret,
Comme étant de mon cœur les plus sûrs secrétaires.

Aussi ne veux-je tant les peigner et friser,
Et de plus braves noms ne les veux déguiser
Que de papiers journaux ou bien de commentaires.


Joachim du Bellay

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Le poème est l'événement majeur

17 Septembre 2016, 03:54am

Publié par vertuchou

Le poème est l'événement majeur susceptible de survenir dans l'ordre de la langue.

Tout poème fait séisme, met à jour des couches ensevelies de la mémoire des mots. Ce n'est pas dans le sujet traité qu'agit la poésie; c'est dans le glissement de sens perpétué dans le paysage domestique de la langue.

Aussi le poète ne "traite"-t-il pas de sujet; ce sont les mots qui traitent leur propre sujet. C'est pourquoi la pertinence, à l'inverse des habitudes de la pédagogie ordinaire, ne consiste pas à se demander ce que le poète a voulu dire, mais plutôt ce que le texte vous dit, à vous lecteurs, dans la relation personnelle que vous entretenez avec chacun des mots qui le constituent. (...)

Chaque lecteur lui est un interlocuteur singulier, invité à "réécrire" tous les sens possibles de tous les mots du poème. C'est pourquoi l'usage de la poésie est nécessairement solitaire.

Gil Jouanard, L'oeil de la terre

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sommes-nous

16 Septembre 2016, 03:47am

Publié par vertuchou

sommes-nous
cette fable
que notre corps
raconte


sommes-nous
le mot de l'énigme

un presque vivre
ou un presque mourir
quelque chose d'étrange
entre Dieu et poussière


sommeil
comme désert
ou village
sous la neige


Raymond Farina

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