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L’espoir est la créature avec des ailes…

6 Janvier 2025, 01:59am

Publié par vertuchou

L’espoir est la créature avec des ailes
Qui se perche dans l’âme
Et chante l’air sans les paroles
Et ne s’arrête jamais.

C’est la voix la plus douce dans la rafale ;
Affreux doit être l’orage
Qui pourrait déconcerter l’oiseau
Qui réchauffait tant de monde.

Je l’ai entendu au pays le plus froid
Et sur la mer la plus étrange ;
Pourtant jamais dans la détresse
Il ne m’a demandé une miette.

Emily Dickinson

 

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L'intérieur de tes cuisses

5 Janvier 2025, 00:27am

Publié par vertuchou

L'intérieur de tes cuisses cache deux ronds nus et blancs, parfaitement symétriques, qui se font face comme deux jumeaux au visage pâle reliés par leur chevelure buissonnante. Deux clairières dont j'avais un jour décrété qu'elles m'appartenaient et que je voulais y passer le restant de mes jours, lovée à l'ombre de l'arbre qui surplombe la forêt quand le désir est à son zénith.

Gaëlle Fonlupt, Elle voulait vivre dans un tableau de Chagall

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Nous

4 Janvier 2025, 00:24am

Publié par vertuchou

Nous aurons des douches neuves remplies d’alluvions et d’odeurs atroces.

Nos corps pleureront des gouttelettes de suie brune.

Tu verras comme nous serons heureux.

Tous les jours, nous encenserons nos quinze ans.

Nos fauteuils de velours râpé atteindront la cime des cieux, nous aurons même la foi.

Les devins s’arrêteront à notre porte fermée pour quérir un verre de lait.

Nos enfants ne diront jamais rien.

Les matins seront chauds, les soirs froids.

Nos yeux ne se quitteront que pour aller cueillir des pommes vertes que nous laisserons paresseusement choir dans un grand panier d’osier aux éclats ternes.

Tu verras comme nous serons heureux.

Nous donnerons des perles aux cochons, des sous aux pauvres, de l’alcool aux alcooliques, des baisers aux amoureux, de la viande aux chiens, des poissons aux oiseaux et du blé aux assassins.

Nos amis ne nous quitteront plus.

Nous mettrons nos mères et nos pères au champ d’honneur.

Les alchimistes gérontologues feront le pied de grue devant des fenêtres que nous aurons nombreuses et propres.

La musique adoucira nos mœurs terribles et dégradantes.

Nous parlerons français avec un accent salvadorien afin de se rappeler notre défunt Chico mort à la guerre comme une carpe.

Nous aurons des oiseaux de proie blottis au creux des armoires, des coqs en pâte et des poules au pot.

Nombreux seront nos ennemis.

Tu verras comme nous serons heureux.


Geneviève Desrosiers

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La salle de bain du Vatican

3 Janvier 2025, 00:19am

Publié par vertuchou

Fernando Botero, La salle de bain du Vatican, huile sur  toile, 2006

Fernando Botero, La salle de bain du Vatican, huile sur toile, 2006

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Semper eadem

2 Janvier 2025, 01:18am

Publié par vertuchou

« D'où vous vient, disiez-vous, cette tristesse étrange,
Montant comme la mer sur le roc noir et nu ? »
— Quand notre cœur a fait une fois sa vendange,
Vivre est un mal. C'est un secret de tous connu,

Une douleur très simple et non mystérieuse,
Et, comme votre joie, éclatante pour tous.
Cessez donc de chercher, ô belle curieuse !
Et, bien que votre voix soit douce, taisez-vous !

Taisez-vous, ignorante ! âme toujours ravie !
Bouche au rire enfantin ! Plus encor que la Vie,
La Mort nous tient souvent par des liens subtils.

Laissez, laissez mon cœur s'enivrer d'un mensonge,
Plonger dans vos beaux yeux comme dans un beau songe,
Et sommeiller longtemps à l'ombre de vos cils !

Charles Baudelaire

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Le poète doit être

1 Janvier 2025, 00:08am

Publié par vertuchou

Le poète doit être celui qui rappelle aux hommes l'idée éternelle

de la Beauté dissimulée sous les formes transitoires de la vie imparfaite

Jules Dupin

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La bouche

31 Décembre 2024, 01:13am

Publié par vertuchou

Ni sa pensée, en vol vers moi par tant de lieues,
Ni le rayon qui court sur son front de lumière,
Ni sa beauté de jeune dieu qui la première
Me tenta, ni ses yeux - ces deux caresses bleues ;

Ni son cou ni ses bras, ni rien de ce qu'on touche,
Ni rien de ce qu'on voit de lui ne vaut sa bouche
Où l'on meurt de plaisir et qui s'acharne à mordre,

Sa bouche de fraîcheur, de délices, de flamme,
Fleur de volupté, de luxure et de désordre,
Qui vous vide le cœur et vous boit jusqu'à l'âme...

Marie Nizet

 

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Tombeau de la Reine

30 Décembre 2024, 01:00am

Publié par vertuchou

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Complainte des complaintes

29 Décembre 2024, 01:58am

Publié par vertuchou

Maintenant, pourquoi ces complaintes ?
Gerbes d’ailleurs d’un défunt Moi
Où l’ivraie art mange la foi ?
Sot tabernacle où je m’éreinte
À cultiver des roses peintes ?
Pourtant ménage et sainte-table !
Ah ! ces complaintes incurables,
Pourquoi ? pourquoi ?

Puis, Gens à qui les fugues vraies
Que crie, au fond, ma riche voix
— N’est-ce pas, qu’on les sent parfois ? —
Attoucheraient sous leurs ivraies
Les violettes d’une Foi,
Vous passerez, imperméables
À mes complaintes incurables ?
Pourquoi ? pourquoi ?


Chut ! tout est bien, rien ne s’étonne.
Fleuris, ô Terre d’occasion,
Vers les mirages des Sions !
Et nous, sous l’Art qui nous bâtonne,
Sisyphes par persuasion,
Flûtant des christs les vaines fables,
Au cabestan de l’incurable
Pourquoi ! — Pourquoi ?

Jules Laforgue

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La belle jeune fille posa sa bouche

28 Décembre 2024, 01:47am

Publié par vertuchou

La belle jeune fille posa sa bouche sur les lèvres de Martin et tandis que son être se dissolvait et que toute volonté l'abandonnait, là-haut les étoiles commencèrent à chanter doucement dans les ténèbres bleutées ; pendant que Martin sentait qu'il goûtait à l'amour, à la mort et aux plus grandes délices qu'un homme puisse savourer, il écoutait le monde chanter et se mouvoir autour de lui en une belle farandole harmonieuse et, sans détacher ses lèvres de la bouche de la jeune fille, sans plus rien vouloir ni désirer au monde, il se sentit emporté avec elle dans la ronde qui entraînait toute chose, il ferma les yeux et s'envola, saisi d'un doux vertige, jusqu'à cette route sonore et tracée d'avance, de toute éternité, et sur laquelle aucun savoir, aucune action ni rien de temporel ne l'attendaient plus.

Hermann Hesse, Histoires d'amour

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